[i]
ANNEXE
Annexe 1: principaux textes législatifs et réglementaires
CODE CIVIL
Article 16-1 « Chacun a droit au respect de son corps. Le
corps humain est inviolable » « le respect dû au corps humain ne
cesse pas avec la mort. Les restes des personnes décédées, y compris les
cendres de celles dont le corps a donné lieu à crémation, doivent être traités
avec respect, dignité et décence »
Article 16-3 « il ne peut être porté atteinte à l’intégrité
du corps humain qu’en cas de nécessité médicale pour la personne ».
TEXTES
LEGISLATIFS DEPUIS 1976
La Loi
76-1181 du 22 décembre 1976 (dite « Caillavet »)
« relative aux prélèvements
d’organes » avait pour principal objectif d’augmenter le nombre de
prélèvements en vue de transplantation d’organes. Elle stipulait que des
prélèvements pouvaient être faits dans un but thérapeutique ou scientifique sur
les personnes n’ayant pas fait connaître de leur vivant leur refus sur un
registre hospitalier. Le décret
d’application n°75-501 du 31 mars
1978 ne contraignait pas les médecins ou l’administration à rechercher
auprès de la famille la volonté du défunt, en l’absence d’opposition puisqu’il
s’agit avant tout d’un consentement
présumé.
La Loi
94-654 du 29 juillet 1994 (dite « de
Bioéthique »), dans son article
L671-7 du code de la santé publique, autorise les
prélèvements à des fins scientifiques dès lors que la personne «n’a pas fait connaître de son vivant le
refus d’un tel prélèvement » qui peut être exprimé par tout moyen,
notamment sur le Registre National des Refus (créé en 1996 et géré par l’
Etablissement Français des Greffes) ce qui ne modifie pas la Loi de 1976. A
défaut, « si le médecin n’a pas
connaissance de la volonté du défunt il doit s’efforcer de recueillir le
témoignage de sa famille ».
La Loi
n°2004-8000 du 6 août 2004, confirme la Loi de 1994.
Le registre National de
Refus automatisé est maintenant géré par l’Agence de Biomédecine. Ce registre
est interrogé par un document écrit daté et signé du directeur de
l’Etablissement de santé et la réponse est donnée par un document écrit du
directeur de l’Agence, autorisant les prélèvements qui ont pour but le progrès
des connaissances médicales et notamment le recueil et la conservation
d’échantillons humains voués à la recherche.
La loi
2011-814 du 7 juillet 2011 révise la loi de Bioéthique et
n’apporte aucune modification à la Loi de 2004 en ce qui concerne les
prélèvements d’autopsie.
Ces lois de Bioéthique ont
créé une série d’infractions pénales venant à
l’appui du dispositif législatif (art. 225-17, du code pénal).
CAS PARTICULIERS
3a) prélèvements effectues
sur le foetus
La Loi encadre aussi, de
façon stricte les actes impliquant les prélèvements
scientifiques et les études génétiques. En outre, la législation en 1992 a
précisé le cadre et la mise en conformité des critères français de viabilité
foetale avec les critères de l’OMS, passant de 7 mois ou 28 semaines à 22
semaines d’aménorrhée ou un poids du fœtus égal ou supérieur à 500 grammes. La
pratique des examens en foetopathologie dans un but diagnostique ou
scientifique ne peut s’effectuer qu’après le recueil du consentement écrit de
la mère et dans l’encadrement juridique des prélèvements à visée scientifiques
(code de la santé publique, art.L.2213-1,
R.2213-1, art.L.1211-2, L.1232-2, art.L1241-5, décret n°2007-1220 du 10 aout
2007 et circulaire n°2009-182 du 19juin 2009). Le 30 juin 2014, la Haute
Autorité de Santé a publié le premier protocole de référence pour la
réalisation des autopsies des foetus et des nouveau-nés. Il précise les
situations cliniques pouvant conduire à la réalisation de l’autopsie et les
conditions de l’examen ainsi que les investigations à mener dans le but
d’homogénéiser les pratiques.
3b) pour ce qui concerne
les mineurs ou majeurs sous tutelle (article l.1232-2 du code de la santé publique) il est précisé que le consentement doit être explicite et
donné par l’autorité parentale ou le tuteur.
3c) l’arrêté du 20 juillet 1998 stipule que les prélèvements à visée
scientifique peuvent être effectués sur les malades décédés d’une maladie
contagieuse, sous réserve que soient respectées « les précautions
universelles qui s’imposent afin d’éviter toute contamination du personnel ou
de l’environnement».
3D) L’arrêté du 16 juillet 2007 indique que lorsque LES CORPS SONT
«CONTAMINANTS», les autopsies doivent être strictement limitées aux cas
représentant un grand intérêt pour la santé publique et réalisés dans une salle
de niveau de confinement 4.
Autres réglementations complétant
l’arsenal législatif :
-
Concernant le transport de corps,
Le décret 2002-1065 du 5
août 2002 porte à 24 heures le délai de transport de corps à visage découvert,
c’est à dire avant mise en bière (mise en cercueil), que ce soit vers la
résidence du patient, vers une chambre funéraire ou un établissement
hospitalier. Ce délai considéré, en son temps, comme extrêmement court pour
permettre de procéder à une demande d’autopsie a été modifié par le décret 2011-121 du 28 janvier 2011
qui l’a porté à 48 heures à compter de l’heure du décès (art R : 2213-11
du code des collectivités territoriales).
Après autopsie, le délai
réglementaire applicable aux transports de corps doit être respecté.
L’article R. 2213-2-1 du Code
général des collectivités locales modifié par l’article 6 du décret n°2011-121 du 28 janvier 2011dresse la liste des affections
transmissibles interdisant le transport du corps sans mise en bière.
- Concernant les normes d’hygiène
et de sécurité des salles d’autopsies,
La circulaire 2004-382 du
30 juillet 2004 concerne l’application des normes d’hygiène et de sécurité dans
les lieux de prélèvements, les salles d’autopsies et les chambres mortuaires.
Elle fait suite à l’apparition du Sida et des encéphalopathies spongiformes
subaigües transmissibles (ESST) Creutzfeldt Jakob et autres maladies à prions.
Les recommandations ont pour objectif la protection du personnel et de
l’environnement pour les agents transmissibles, à l’exception des agents
pathogènes du groupe 4.
Le comité de lutte contre les
infections nosocomiales (CLIN) et le comité d’hygiène, de sécurité et des conditions
de travail (CHSCT) veille au suivi des
réglementations en vigueur. La mise en conformité de la salle d’autopsie doit répondre aux
spécifications de l’arrêté du 7 mai 2001
ainsi qu’aux recommandations plus précises concernant les locaux, les équipements,
les évacuations de déchet.
Annexe 2: l’autopsie
scientifique en france au XIXe siècle
Quelques pistes de
réflexion
Bruno Bertherat
L’autopsie scientifique en France
est aujourd’hui en déclin. De multiples études montrent la baisse du nombre des
autopsies scientifiques et s’en alarment. Or, un siècle auparavant, au XIXe
siècle, l’autopsie scientifique tient une place centrale dans les pratiques
médicales hospitalières. On pourrait presque parler d’un âge d’or. Le but de
cet exposé n’est pas de porter un jugement sur ce déclin, mais de proposer
quelques pistes de réflexion d’un historien sur l’importance de l’autopsie
scientifique en France au XIXe siècle. Il s’agira de comprendre
pourquoi l’autopsie scientifique tenait une place si importante dans les
pratiques médicales hospitalières.
Il faut commencer par rappeler qu’il
y a deux types d’autopsies, qui sont souvent comparés: l’autopsie scientifique
et l’autopsie médico-légale. Si les deux visent principalement à
l’établissement de la cause de la mort, la première a des buts scientifiques,
la seconde est ordonnée dans le cadre d’une procédure judiciaire et elle est
effectuée par un médecin expert. Il n’est pas anodin de dire que l’autopsie
judiciaire et la figure de l’expert connaissent aussi un âge d’or au XIXe
siècle.
Pour répondre à la question
initiale, trois points seront abordés: le cadre conceptuel dans lequel se situe
l’autopsie scientifique; les pratiques qu’elle induit et les résultats
revendiqués; les remises en cause qui apparaissent à l’époque.
Ce cadre conceptuel, c’est la méthode
anatomo-clinique, véritable révolution qui se produit au tournant des XVIIIe
et XIXe siècles. Elle consiste à recueillir une série d’informations
et d’observations sur les patients par des examens répétés. C’est la démarche
clinique (kliné signifie lit, ici le
lit du patient). Elle fait le lien entre le corps et la maladie et ses
symptômes. La maladie est dans le corps: elle touche des parties du corps et
des organes. Il faut donc trouver où elle se trouve et quel type d’empreinte
elle laisse sur ou dans le corps.
L’examen porte non
seulement sur le corps vivant, mais aussi sur le cadavre. On vérifie sur le
cadavre le diagnostic posé précédemment. L’autopsie est le point ultime de la
chaîne des observations du corps. Cette importance de l’autopsie est résumée
par Xavier Bichat (1771-1802), médecin de l’Hôtel-Dieu de Paris, l’un des
fondateurs de la méthode anatomo-clinique: «Ouvrez quelques cadavres: vous
verrez aussitôt disparaître l'obscurité que la seule observation n'avait pu
dissiper» [cité par Foucault, 1963, p.148]. L’anatomie pathologique
s’inscrit dans cette démarche. C’est une spécialité enseignée dans les facultés
de médecine.
L'ouverture des cadavres n'est pas une
nouveauté. Elle remonte à l'Antiquité. À partir du XVIe siècle, les
autopsies deviennent plus fréquentes. L'Italien Morgagni (1682-1771) fonde les
bases de la pathologie organique. Le médecin note les symptômes des maladies et
les vérifie par les autopsies. Se met alors en place une véritable routine de
l'observation clinique. On peut reprendre ici une formulation du docteur Émile
Goubert, auteur d’un des premiers manuels consacrés essentiellement à la
pratique de l’autopsie scientifique: «La nécropsie, critérium du diagnostic,
est le contrôle et le complément indispensable de toute observation médicale ou
chirurgicale bien prise». L'accumulation des observations permet de faire
progresser le savoir médical.
L’autopsie scientifique a un lieu
d’exercice: l’hôpital. Autrefois dévolu à un rôle d’assistance, l’hôpital
devient un lieu d’observation et de surveillance médicale, qui permet de
multiplier les observations sur les malades et les cadavres. Si c’est dans
l’amphithéâtre de dissection que l’on apprend à disséquer, c’est à l’hôpital
que l’on apprend à autopsier.
Centre de soin, l'hôpital devient
aussi un centre de recherche et d'enseignement. D'où le prestige du corps
médical hospitalier jusqu'à nos jours. Grâce à ses nombreux hôpitaux, unifiés
sous l’égide de l’Assistance publique, Paris domine le paysage français. Cette
prééminence est renforcée par des concours sélectifs, l'externat et surtout
l'internat. L’internat ouvre les portes des hôpitaux et permet d’approfondir
l’apprentissage médical.
L’autopsie est donc intégrée à la formation
des élites médicales et elle fait partie des pratiques nécessaires à la
recherche. Pour ces raisons, il y a un véritable consensus dans le monde
médical du XIXe siècle sur la nécessité de faire des autopsies dans
le système hospitalier.
Quelles sont les recommandations
pour faire une bonne autopsie scientifique ? Et quels sont les résultats
sinon obtenus du moins attendus? Les sources de l’époque font la comparaison
systématique avec l’autopsie judiciaire. Ainsi, Émile Goubert, cité précédemment,
fait allusion à de multiples reprises aux autopsies médico-légales. Pour la
plupart des spécialistes, l’autopsie scientifique doit être complète, à
l’instar de l’autopsie judiciaire.
Toutefois, dans la pratique, il y a
des différences. Ainsi, en 1842 (par un arrêté du 6 avril), le Conseil général
des hospices limite par arrêté l'étendue de l'autopsie anatomo-pathologique «à
l'exploration des organes dont l'étude paraît indispensable» (article 7). En
théorie au moins, il faut tenir compte des sentiments des familles des décédés.
L’autre raison est scientifique et tient au cadavre lui-même. Si l'autopsie,
effectuée à l’hôpital, a pour but de confirmer un diagnostic posé précédemment
sur le malade, il n’est pas nécessaire qu’elle soit complète.
Quels sont les résultats obtenus
sinon attendus? Dans un premier temps, la connaissance des maladies apparaît
comme un préalable à la thérapeutique, tant les médecins du temps semblent
démunis par rapport aux maladies. Ce qui explique par ailleurs l’importance croissante
accordée à l’hygiène publique. Les médecins anatomo-pathologistes tentent donc
d’établir des nosologies (classement des maladies). À l'Hôtel-Dieu, Bichat
impose des autopsies rapides, qui permettent de confirmer le diagnostic ante
mortem. L'ensemble de ses observations lui permet de fonder l'histologie
(l'étude des tissus).
Par la suite, la question du
traitement apparaît de plus en plus importante. Émile Goubert prend l’exemple
du professeur Jean-Baptiste Bouillaud (1796-1881) à qui il a dédicacé son
ouvrage. «Pendant dix-huit ans que l’auteur de la Nosologie philosophique prit lui-même les observations au lit de
ses malades de la Charité, les dictant à ses auditeurs, et pratiquant en
personne l’ouverture des cadavres, que de précieuses découvertes n’eut-il pas
occasion d’enregistrer pour la science? ne fût-ce que l’endocardite, affection
jusque-là passée inconnue, et dont il apprit enfin à arrêter les ravages». Ce
en quoi il s’avance sans doute beaucoup: il y a loin entre l’identification de
la maladie et son traitement.
Enfin, l’autopsie scientifique est
un facteur d’autant plus important de progrès qu’elle intègre dans sa démarche
les nouvelles pratiques et techniques médicales. C’est le cas du microscope qui
s’impose progressivement dans la recherche médicale. Émile Goubert est
convaincu de son utilité: «Quand on n’emploie pas le microscope, la partie
anatomo-pathologique d’une observation échappe à toute analyse. Si bien exercés
que soient les sens d’observation, ils ne peuvent suppléer au microscope, seul
susceptible d’apprendre si les éléments sont ou non altérés».
Technique consensuelle, ouverte aux
innovations, l’autopsie scientifique connaît pourtant des remises en cause.
Quelles sont-elles et quelle est leur ampleur?
Ces remises en cause sont de natures
très différentes. Il y a durant tout le siècle une opposition entre deux
exigences, celle des familles, de l’opinion publique qui sont rétives à
l’autopsie, parce que celle-ci remet en cause l’intégrité du corps et les
pratiques funéraires, et celles des médecins. Chateaubriand écrivait au début
de ses Mémoires d’outre-tombe,
publiés juste après sa mort: «Qu'on sauve mes restes d'une sacrilège autopsie;
qu'on s'épargne le soin de chercher dans mon cerveau glacé et dans mon cœur
éteint le mystère de mon être. La mort ne révèle point les secrets de la vie».
Pour les médecins, au contraire, les exigences de la science incitent à
pratiquer les autopsies.
Les médecins trouvent dans les
hôpitaux et dans les morgues, les cadavres nécessaires: corps non identifiés,
non réclamés. Mais pour les corps réclamés, il faut tenir compte de l’avis des
familles, au grand dam de certains médecins. Ce qui n’est pas bien sûr le cas
des autopsies judiciaires qui s’imposent à tous. En 1842 (il s’agit de l’arrêté
du 6 avril), le Conseil général des hospices permet les autopsies
(scientifiques), sauf si la famille déclare son refus formel. Mais celles-ci ne
sont guère au courant de la nécessité, de l’existence même de cette
déclaration. On notera que les médecins, s’ils défendent la nécessité de
l’autopsie, ne vont pas jusqu’à faire don de leur propre corps, sauf
exceptions.
L’autopsie
a donc toujours été perçue de manière négative. Toutefois, à la fin du siècle,
cette mainmise médicale doit affronter le mécontentement croissant de l’opinion
publique. Les polémiques s’amplifient dans la presse, dans les livres. Le
pamphlet de Léon Daudet sur le pays des Morticoles, sur le modèle des Voyages de Gulliver, décrit avec
férocité un pays imaginaire (en fait, la France républicaine qu’il exècre),
dirigé par les médecins, adeptes de l’expérimentation sur les êtres humains.
Cette préoccupation s'étend même aux criminels. Certains médecins remettent en
cause les expériences sur les têtes de guillotinés.
S’élabore progressivement une
éthique de l’expérimentation. Une attention croissante est portée à la
souffrance des malades en milieu hospitalier, au moment où s’impose
l’anesthésie. «Tout se passe comme si […] le corps médical s'était
progressivement montré sensible à la souffrance des vivants, la douleur n'étant
plus un gage de guérison, puis à la dignité de cadavres», souligne l’historien
Frédéric Chauvaud [Chauvaud, 2000, p. 99].
Les remises en cause sont aussi
internes au monde médical. La méthode
anatomo-clinique est concurrencée dans la deuxième moitié du siècle par
d’autres révolutions scientifiques. Ainsi, le développement de la physiologie,
qui étudie le fonctionnement des organismes vivants. Claude Bernard souligne
bien les différences dans son maître-livre, Introduction à l'étude de la
médecine expérimentale, publié en 1865. Il oppose
l'anatomo-clinique à la science expérimentale, l'observation à
l'expérimentation.
On
pourrait ajouter aussi la microbiologie (avec Pasteur). L’expérimentation et le
laboratoire apparaissent progressivement comme le complément indispensable de
l’autopsie et de l’hôpital. L’autopsie n’est plus située à la fin de la chaîne
médicale; elle en constitue un maillon, certes toujours essentiel, mais plus
suffisant. Le laboratoire devient le lieu emblématique du progrès médical à la
fin du siècle. C’est peut-être cette évolution qui annonce les remises en cause
de la deuxième moitié du XXe siècle.
L’autopsie scientifique a encore
quelques belles années devant elle, jusqu’aux années 1950. Il faudrait dès lors
établir une chronologie fine qui montrerait les grandes évolutions vers le
déclin actuel. Cela passe notamment par un travail de décompte des autopsies
dans les grands hôpitaux et par une étude plus systématique de l’histoire de
l’autopsie scientifique sur une longue durée et enfin par une comparaison avec
l’évolution de l’autopsie judiciaire.
L’élargissement de l’approche doit
être aussi géographique et thématique. Il faudrait comparer les pratiques
françaises avec celles d’autres pays occidentaux. Il y a en effet des cultures
médicales différentes et les évolutions ne sont sans doute pas les mêmes. Il
faudrait enfin replacer cette histoire dans une histoire plus large du rapport
physique du médecin au corps (sain, malade ou mort), si important au XIXe
siècle dans les structures hospitalières en particulier. N’assiste-t-on pas
aujourd’hui à une forme d’éloignement?
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Serenella, « Les soignants face aux politiques d’humanisation de la mort à
l’hôpital. France, XIXe-XXe siècles », in Florent
SCHEPENS dir., Les Soignants et la mort, Paris, Érès, coll. Clinique du
travail, 2013, p. 105-117.
Annexe 3 : l’autopsie
de l’enfant (nouveau-nés exclus)
Les autopsies se sont fortement
raréfiées chez l’enfant depuis 30 ans pour plusieurs raisons:
·
la
diminution de la mortalité infantile (0-1an) à moins de 5 o/oo des
naissances vivantes;
·
la
raréfaction et même parfois la disparition de certaines maladies infectieuse
(Rhumatisme articulaire aigu, rougeole etc…;
·
l’efficacité
du traitement chirurgical de nombreuses malformations congénitales en
particulier cardiaques, digestives et rénales;
·
la
baisse du nombre des nouveaux nés polymalformés car ils sont reconnus «in utero» ce qui conduit à une IMG;
·
les
progrès de l’imagerie médicale et des techniques diagnostiques virologiques et
génétiques
Elles requièrent l’autorisation
écrite des deux parents ou du tuteur légal
Elles sont conseillées dans les cas
suivants:
·
Mort
subite du nourrisson ou de l’enfant, qu’elle soit effectuée à titre
diagnostique (permettant un conseil aux parents pour concevoir un autre
enfant).ou médico-légal;
·
Dans le
cadre d’une malformation congénitale pour confirmer le diagnostic «in vivo» et obtenir un conseil génétique
·
Dans le
cadre d’un syndrome poly-malformatif étiqueté (plus de 800 connus) afin de
confirmer le diagnostic
·
Dans
tous les cas où l’enfant décède d’une affection non étiquetée «in vivo» pour que puisse être effectuée
une enquête génétique et porté conseil aux parents.
·
Dans le
cadre d’un traumatisme pour confirmer les lésions mais aussi à titre médico
légal.
Annexe
4 : l'autopsie foetale et
neonatale (foetopathologie)
La Foetopathologie est
la discipline médicale morphologique étudiant les produits de conception ayant
abouti à un échec (interruption spontanée de grossesse du 1er trimestre, interruptions spontanées
ou médicales du 2ème semestre de la grossesse, examen des morts
foetales in utero « MFIU » et des décès périnataux avant le 28ème
jour). Elle est née dans les années 1970 quand se développait le
diagnostic anténatal. La Société
Française de Foetopathologie (SOFFOET), association régie par la loi de
1901 créée en 1984, a été reconnue Société Savante
par le Conseil National de l'Ordre des Médecins, puis Organisme Gestionnaire de
Développement Personnel Continu. L'examen foetopathologique, autopsie foetale
accompagnée de l'examen du placenta, est un acte de bonne pratique: tout échec de grossesse fait évoquer le
risque de récidive. Le conseil génétique est basé sur un faisceau d'arguments
parmi lesquels l'examen foetopathologique tient une place majeure et reste l’examen de référence dans la
recherche étiologique des échecs de grossesse.
Cadres réglementaires de la pratique des autopsies foetales et
néonatales
Les trois plus importantes dispositions réglementaires sont précisées
dans plusieurs textes de loi, concernant les conditions d’autorisation
d’une IMG (IMG), la pratique des examens foetopathologiques dans un but
diagnostique ou scientifique après recueil du consentement écrit de la mère, et
l’encadrement juridique des prélèvements à visée scientifique (code de la santé publique (art. L. 2213-1 et
s. et R. 2213-1 et s", art. L. 1211-2, L. 1232-2 et L. 1241-6,
art. L. 1241-5), décret n° 2007-1220 du 10 août 2007 et circulaire
DGCL/DACS/DHOS/DGS/DGS no 2009-182 du 19 juin 2009). En France, l’IMG est
possible jusqu'à la naissance, à la différence d’autres pays européens où elle
n’est autorisée qu’avant le délai de viabilité foetale (1).
Il
n'existe actuellement aucun cadre réglementaire de la formation et des diplômes
d’exercice de la foetopathologie.
Seuls devraient exercent dans ce domaine les praticiens ayant acquis une
compétence spéciale. En 1989, La SOFFOET a proposé une formation
spécifique : un Diplôme Universitaire (DU) de Foetopathologie à
l'Université Pierre et Marie Curie, Paris VI, transformé en 2000 en un Diplôme
Inter-Universitaire (DIU) de Pathologie Fœtale et Placentaire regroupant
actuellement 8 universités contractantes. Cet enseignement est suivi aussi par
les étudiants du Diplôme d'Études Spécialisées Complémentaires (DESC) de Foetopathologie issus des filières
Anatomie Pathologique, Imagerie Médicale, Gynécologie Obstétrique, Génétique et
Pédiatrie. Or 32% seulement des étudiants inscrits au DIU de Foetopathologie
sont des pathologistes titulaires du Diplôme d'Etudes spécialisées (DES) d'Anatomie
Pathologique et 50% des étudiants inscrits en DESC ont une formation initiale
en Pathologie. Trente % des foetopathologistes en exercice ont une formation
initiale différente (Echographie,
Histologie, Génétique Clinique, Gynécologie Obstétrique, Médecine
Légale, Pédiatrie, Cytogénétique, Médecine Générale) et seul 78% des
foetopathologistes en exercice sont titulaires d’un DIU de foetopathologie.
Une formation continue est organisée
par la SOFFOET (5 journées par an, ouvertes à
l'ensemble des professionnels de santé œuvrant dans le domaine de la médecine
fœtale).
Indications et buts de la
foetopathologie
Elle établit un bilan phénotypique complet: maturation, croissance, dysmorphologie,
étude macroscopique et histologique des organes identifiant les
mécanismes physiopathologiques des anomalies observées et précisant la
prévalence des divers types d’anomalies.
L'autopsie foetale
accompagnée de l'examen du placenta
est avant tout un acte à visée
diagnostique.
Le protocole de référence publié en juin 2014 par la HAS vise à harmoniser les
pratiques et à améliorer les connaissances sur les circonstances aboutissant à
une mort foetale ou néonatale (2). La description exhaustive des événements
lésionnels précise si les anomalies
observées s’intègrent ou non dans le cadre d’une affection héréditaire. En
cas de MFIU ou de décès périnatal, l'autopsie recherche non seulement les
causes de la mort (pathologie infectieuse, accidents funiculaires, pathologies
vasculaires materno-foetales) mais aussi les pathologies associées.
L'autopsie foetale est le seul examen
permettant de classer précisément un syndrome polymalformatif, à partir
de la synthèse des anomalies macroscopiques et histologiques, et d’orienter
vers des techniques complémentaires adéquates. Rappelons qu'en cas d’IMG, l’autopsie foetale
permet d'identifier des anomalies non découvertes en anténatal dans 23 à 40%
des cas, modifie le diagnostic final dans 35 à 55% des cas et le conseil
génétique dans 12 à 35% des cas (3). L’autopsie foetale ou néonatale est
la clé d’un conseil génétique pertinent. Elle constitue donc un contrôle de qualité indéniable et reste l'examen de référence dans
la recherche des causes des échecs de grossesse. L’autopsie fœtale devrait être
une obligation légale pour tous les diagnostics portés dans les centres de
diagnostic anténatal et de décès au cours de la période néonatale. Enfin, c'est un outil de veille sanitaire, en
particulier pour le dépistage d'agents tératogènes environnementaux (4).
L’autopsie
foetale ou néonatale représente un apport considérable pour la recherche sur le
développement humain normal et pathologique. Elle contribue à la réalisation
d'études épidémiologiques, de registres de malformations, l'établissement de données
auxologiques précises, aux recherches sur la physiopathologie des maladies
foetales et à la caractérisation du spectre lésionnel des syndromes
polymalformatifs génétiquement identifiés (variabilité phénotypique). La
conservation de matériel congelé dans les unités de foetopathologie (plateformes
de ressources biologiques de tissus embryo-fœtaux) permet des études
moléculaires a posteriori pour identifier les anomalies géniques ou génomiques
à l’origine de syndromes polymalformatifs non encore identifiés. Ces études
sont effectuées dans le cadre de programmes de recherche rétrospectifs ou
prospectifs juridiquement encadrés.
La pratique de la foetopathologie
Selon les résultats d’une enquête
menée en 2012-2013 par la SOFFOET qui regroupe 120 membres actifs, 75 médecins
exercent la foetopathologie. Soixante-deux ayant répondu au questionnaire
exercent dans 33 structures publiques (24 CHU, 9 CHG) et une structure privée). Douze foetopathologistes sont des
hospitalo-universitaires et 4 sont Professeurs des Universités-Praticiens
Hospitaliers en Anatomie Pathologique, ce qui souligne la sous-représentation hospitalo-universitaire
de cette spécialité. Quarante praticiens hospitaliers exercent la
foetopathologie, 12 de façon exclusive. Les autres partagent leur exercice avec
une autre activité au sein des services de Pathologie.
Le recrutement autopsique des 34
structures est de 6100/an environ, dont 43% d’IMG, 52% de MFIU et 5%
d’autopsies néonatales (350/an), chiffres
méritant d’être comparés aux données épidémiologiques concernant la mortalité périnatale; la proportion d’autopsies néonatales prescrites est
probablement insuffisante: les pertes fœtales sont estimées à 1/200, soit
environ 12000/an en France, dont 5000 IMG (5, 6). Le Rapport Got (1996) sur les
données de 136 centres d’Anatomie Pathologique (excluant les unités de
foetopathologie et les autres services susceptibles de pratiquer des autopsies
fœtales), dénombrait 6465 autopsies fœtales, ce qui confirme la stabilité des
demandes d’actes de foetopathologie (7).
La réalisation de l'examen
foetopathologique nécessite des moyens et des structures adaptés, comportant un plateau technique morphologique dédié à
l’activité foetale: une salle d'autopsie et/ou une pièce de
macroscopie aux normes avec dispositif de macrophotographie et éventuellement
de radiologie, un laboratoire d’histologie permettant d’effectuer des
techniques telles qu'immunohistochimie, microscopie électronique, hybridation
in situ par fluorescence, extraction d'ADN et parfois des examens
neuropathologiques spécialisés, un système de stockage de tissus congelés pour
les études biochimiques et génétiques ultérieures, enfin des relations étroites
avec les services d’imagerie, de bactériologie, de virologie, de parasitologie,
de cytogénétique et de génétique moléculaire.
L’autopsie
foetale ou néonatale comporte plusieurs étapes décrites dans le protocole type de l’HAS, incluant l’étude du dossier médical maternel et fœtal, et la
vérification de la conformité des documents administratifs et des consentements
et la pratique de photographies et de radiographies systématiques. L'examen
macroscopique (foetus ou nouveau-né et placenta) est effectué selon un protocole rigoureux et le corps reconstitué «ad integrum».
Après l’examen macroscopique complémentaire sur tissus fixés, des prélèvements systématiques à visée histologique de l'ensemble
des organes, y compris l'encéphale, sont effectués. Les résultats sont consignés dans un rapport de synthèse.
Le temps médical de l’examen est de 8 heures au minimum. L'autopsie foetale, complexe, demandant souvent plusieurs jours
ou semaines, doit être pratiquée par un médecin expérimenté et très motivé.
Reconnaissance de la spécifité de la
foetopathologie
Les
effectifs sont insuffisants pour faire
face aux spécificités de l'acte autopsique foetal ou néonatal. Dix des 46 CPDPN français ne travaillent pas en lien direct avec un
médecin expérimenté en foetopathologie. Selon l'enquête de la SOFFOET, la
démographie est préoccupante: 71% des médecins foetopathologistes estiment que
le nombre de postes dédiés à est trop faible et 39% que le personnel technique
est insuffisant. Lors de leur cessation
d'activité proche, 80% des médecins ne seront pas remplacés et dans 68% des
cas, aucun praticien n’est en formation dans leur structure. Lorsqu’un successeur
éventuel est prévu, ce dernier n'est pas pathologiste dans 25% des cas. Huit
foetopathologistes prendront leur retraite dans moins de 5 ans; 7 n'ont pas de
successeur. La pénurie est liée aux conditions difficiles d'exercice, à la
priorisation d'autres activités au sein des laboratoires de Pathologie, et
aussi à la mauvaise individualisation voire à la méconnaissance de la
spécialité. La complexité de
l'autopsie foetale et néonatale doit être enfin reconnue. La
compétence au moins médicale, sinon universitaire, des médecins qui la pratiquent doit être aussi reconnue.
La situation critique actuelle de la
« démographie foeopathologique », devrait également conduire à une
formation de techniciens spécialisés d’autopsie (à statuts reconnus) et de
laboratoire, ce qui pourrait apporter une solution palliative aux
difficultés soulevées par la complexité de la discipline.
La reconnaissance de la
spécialité est liée à une cotation et
une tarification correspondant au coût réel de l'acte. Selon la
décision de l’Union Nationale des Caisses d’Assurance Maladie relative à la
liste des actes et prestations pris en charge par l’assurance maladie parue au
Journal Officiel le 25 avril 2010, la cotation afférente à l'examen
foetopathologique est JQQP003 - Autopsie médicale
d’un foetus ou d’un nouveau-né de moins de 4 jours de vie, avec ou sans examen
de l’encéphale (61,60 €) - et ZZQP164
- examen du placenta (61,60 €). Le
coût réel de l'examen varie, selon
la pathologie en cause, de 820 € à
plus de 2100 € lorsque des techniques complémentaires complexes
doivent être mises en œuvre. Il ne peut être demandé à des structures médicales
de pratiquer des autopsies foetales selon les normes de qualité et de sécurité
requises sur la base du tarif actuel. De plus, la CCAM ne prend actuellement
pas en compte les autopsies au-delà de 4 jours de vie. A la suite d’une demande
émanant de la SOFFOET, les actes d'autopsie foetale et néonatale ont été
réécrits en 2012, mais la réévaluation financière n'apparaît pas dans la
nouvelle nomenclature (CCAM-V2).
L'absence d'attribution de
moyens suffisants pourrait mettre en péril l’exercice de la discipline et aboutir à
la disparition pure et simple de la Foetopathologie, recul de notre système de
santé, puisqu’une grossesse sur 10 s’arrête spontanément et que 3 à 5% des
enfants naissent avec des anomalies graves du développement. L'autopsie foetale
doit être pratiquée par des médecins dans des structures agréés. Compte tenu de
la situation critique de la démographie il serait également souhaitable de
mutualiser les plateformes techniques de foetopathologie et les compétences en
les rendant accessibles à l’ensemble des laboratoires de chaque région
géographique.
Références
bibliographiques
1- Marret H., Perrotin
R., Descamps P., De Magalhaes A., Lansac J., Body J. Interruption médicale de
grossesse au 2ème et 3ème trimestre. J. Gynecol. Obstet. Biol.Rep
rod, 1999, 28, 245-249
2- Protocole type
d'examen autopsique foetal ou néonatal. HAS, service des bonnes pratiques
professionnelles, juin 2014
3- Roume J., Gonzales
M., Mulliez N. Place du pathologiste dans le diagnostic prénatal et le conseil
génétique. Ann. Pathol., 1997, 17, 256-259
4- Delezoide A.L.
Examen foetopathologique après décès foetal. Prescrire, 2007, 135-142
5- Merg D., Schmoll P.
Ethique de l'IMG en France, questions posées par le dispositif des centres
pluridiscilinaires de diagnostic anténatal. Les dossiers de l'Obstétrique,
2005, 21-29
6- Vilain A., Mouquet
M.C. Les interruptions volontaires de grossesse en 2001. Paris, Direction de la
recherche, des études et des statistiques, Etudes et Résultats, Paris, n°279,
décembre 2013
7- Got C. Rapport sur
les autopsies médico-scientifiques, La documentation française, 1996.
Annexe 5: don de corps à la science
Le don de corps est un legs fondé
sur la volonté, exprimée de son vivant, d’une personne, en pleine maîtrise de ses facultés intellectuelles, de donner
son corps à un établissement de santé, de formation et de recherche. Dès lors,
une carte de donateur lui est remise, qui vaut autorisation à prélèvement à
visée thérapeutique ou scientifique. La volonté exprimée par le défunt est vérifiée auprès du centre receveur. Lors
du décès, le corps est transporté vers le Centre choisi, accompagné d’un
certificat de décès attestant l’absence d’indication à un examen médicolégal et
précisant que le défunt n’est pas atteint d’une affection transmissible
répertoriée [14]. Le délai de
transport de corps (subordonné à une déclaration préalable à la mairie du lieu
de décès) ne doit pas excéder les 48 heures réglementaires suivant le
décès.
Le centre de
don de corps de Paris de l’Université des Saint Pères connaît un accroissement
des demandes et
centralise la
formation en anatomie par la dissection dans de multiples spécialités,
notamment chirurgicales.
Pour la
recherche, l’utilisation des corps est soumise à un protocole précis et à
l’accord d’un conseil
scientifique.
Le budget du centre est abondé par les produits de facturation en provenance de
multiples
sources: le
transport du corps, pris en charge par la famille, est facturé entre 400 et 700
euros. Les travaux
scientifiques
sont pratiqués au laboratoire d’anatomie par des médecins privés ou publics. La
dissection est
facturée
1380 (examen complet du corps) ou 680 euros (étude de pièce anatomique) à un
organisme privé;
690 (examen complet) ou 402 euros
(pièce anatomique) sont demandés à un organisme public. La crémation est
facturée 413 euros. En 2013, le centre a accepté 650 corps, dont 123 ont été
embaumés et 427 étudiés.
Les dispositions réglementaires sur
le don de corps restent sommaires; aucune modification n’a été apportée à
l’article 3 de la loi du 15 novembre 1887 (JO du 18/11/1887) qui stipule que «Tout majeur ou mineur émancipé,
en état de tester, peut régler les conditions de ses funérailles, notamment en
ce qui concerne le caractère civil ou religieux à leur donner et le mode de sa
sépulture… Il peut charger une ou plusieurs personnes de veiller à l’exécution
de ses dispositions… Sa volonté… a la même force qu’une disposition
testamentaire relative aux biens”. «Il peut donner son corps à une Faculté de
Médecine pour l’Enseignement ou la Recherche.» Paradoxalement, la destination
du corps humain à des activités de recherche ne figure ni dans la législation
de bioéthique, ni dans celle de la recherche biomédicale, puisque le legs
effectué de son vivant par la personne résout la question juridique.
Annexe 6 : un exemple de centre de
référence
le service d’anatomie pathologique
neurologique du GH pitié-salpêtrière de paris
Ce service réalise le plus
grand nombre d’autopsies de personnes adultes en France (25% du total
national). Financé notamment par l’APHP, l’Université Paris VI, l’ICM, l’InVS,
La DGS, l’INSERM, il a créé le Groupement
d’Intérêt Economique (GIE) Neuro-CEB (Collections d’échantillons biologiques
neurologiques) en collaboration avec diverses organismes caritatifs.
Siège du Centre de
référence des agents transmissibles non conventionnels de l’InVS, il coordonne
le réseau de neuropathologie de la maladie de Creutzfeldt-Jakob de la DGS. Le service assure la veille sanitaire
concernant la maladie de Creutzfeldt-Jakob et les maladies apparentées: il
reçoit une enveloppe budgétaire annuelle de l’Institut de veille sanitaire
(INVS) dont une partie est réservée aux centres qui réalisent des autopsies de
malades décédés d’encéphalopathie de Creutzfeldt Jakob. Elle permet aussi de
rémunérer les transports de corps et les
tests biologiques (Western blots «prions») dans les cas suspects d’ESST.
Le Neuro-CEB illustre
l’importance non seulement diagnostique mais aussi pour la recherche de
l’autopsie: grâce notamment à une coordinatrice et à une ingénieure
de recherche, il approvisionne des banques de tissus obtenus par un don
d’organe suivant un consentement écrit du sujet, de son vivant. Il regroupe
quatre associations de malades et repose sur un maillage de 15 services ou
unités universitaires de neuropathologie, ce qui lui a permis de fonder une
«cérébrothèque» à vocation nationale en 2004. Les équipes de recherche participent
aux frais occasionnés par la collecte et la conservation des échantillons. Une
coordinatrice gère le consentement écrit du malade, qui a fait don de son
cerveau de son vivant, et le recueil du dossier médical. Le GIE finance la
coordinatrice, les transports de corps et les frais de fonctionnement du CRB et
du laboratoire qui en dépend. Une somme de 1000 euros par cerveau est allouée
aux services de neuropathologie ayant réalisé le prélèvement. Les dons sont
rendus anonymes et échantillonnés pour la recherche. La coordinatrice du
centre, contactée par les proches du défunt, organise le transport du corps
vers le CHU le plus proche, puis sa restitution à la famille. L’aide annuelle
fournie par les associations de Patients étant plafonnée, un nombre maximal de
prélèvements est défini chaque année.
Annexe 7 : le témoignage d’un chef de service d’anatomie
pathologique
Jean-Yves Scoazec, PUPH
Chef du service d’anatomie
et cytologie pathologiques de l’hôpital Edouard Herriot, Lyon (2000-2014) Chef
du service de pathologie morphologique de l’Institut Gustave Roussy, Villejuif
(depuis 2014)
Cette
contribution sera limitée à l’autopsie scientifique d’adulte, hors
neuropathologie ; les domaines de l’autopsie en foetopathologie et en
pédiatrie ne seront évoqués que de manière ponctuelle.
Expérience
personnelle
J’ai acquis la spécialité
d’anatomie et cytologie pathologiques au cours de mon Internat (Hôpitaux de
Paris) que j’ai effectué de 1981 à 1985. A cette époque, dans les différents
services de pathologie que j’ai eu l’occasion de fréquenter, il était habituel
d’effectuer une autopsie d’adulte par jour et il était loin d’être exceptionnel
d’avoir plusieurs demandes simultanées, jusqu’à 3, voire davantage. Le
« tour d’autopsie » était la règle pour les internes et les CES (la
double formation existait pour la spécialité et les internes devaient valider
le CES en parallèle), de même que pour les pathologistes seniors qui
encadraient les examens. La réalisation d’autopsies était intégrée à la
permanence du samedi mise en place dans la plupart des services. A cette
époque, l’autopsie faisait (encore) partie de la formation théorique et
pratique de l’interne et du CES (le CES, quand je l’ai passé, comportait une
épreuve pratique d’autopsie ...) et de la pratique quotidienne des
pathologistes seniors; elle s’enseignait par compagnonnage devant la table
d’autopsie, en présence des étudiants hospitaliers; sa réalisation était aidée
par des agents d’amphithéâtre, souvent très expérimentés et capables de se substituer
aux pathologistes pour effectuer des actes spécialisés ou techniquement
difficiles (prélèvements de cerveau et de moelle épinière notamment) ; les
mêmes agents jouaient un rôle essentiel dans la préparation des corps et leur
restitution après l’acte autopsique.
Au terme de mon internat,
j’ai suivi une trajectoire un peu différente de celle de la plupart des
pathologistes en suivant une carrière hospitalo-universitaire orientée vers
l’histologie et la biologie cellulaire et en ayant une importante activité de
recherche. Ce n’est qu’en 1997, soit plus de 10 ans après la fin de mon
internat, que j’ai repris une activité « plein temps » de
pathologiste, en étant nommé PUPH à Lyon, puis en devenant chef du service
d’anatomie pathologique de l’hôpital Edouard Herriot (Hospices Civils, Lyon),
en 2000. En l’espace d’une décennie, la pratique de l’autopsie avait
considérablement changé. Le nombre annuel d’autopsies d’adultes pratiquées à
l’hôpital Edouard Herriot, hôpital multidisciplinaire d’environ 1000 lits à
l’époque, riche en services de réanimation et de chirurgie, oscillait entre 3
et 15. Les autopsies étaient pratiquées par les seniors, les internes n’ayant
pas eu l’occasion de s’y former compte tenu du faible nombre de demandes ;
les pathologistes avaient encore la chance d’être assistés par un agent
hospitalier, formé par les derniers agents d’amphithéâtre avant leur départ à
la retraite ; ce privilège n’était pas partagé par les autres sites des
Hospices Civils de Lyon, où les pathologistes ne recevaient pas d’aide pour la
réalisation de l’acte autopsique et la préparation des corps. La situation de
l’autopsie d’adultes contrastait avec celle de l’autopsie de foetus, rare lors
de mon internat, mais ayant connu une véritable explosion en l’espace
d’une décennie: en effet, dans le même temps où moins de 15 autopsies d’adultes
étaient réalisées annuellement, de 200 à 300 autopsies de foetus et d’enfants
étaient pratiquées chaque année à l’hôpital Edouard Herriot avant que les
services de gynécologie-obstétrique, néonatalogie et pédiatrie ne soient
déplacés dans un autre site hospitalier.
A partir de 2006, la
situation se dégradait encore. En raison de l’état de la salle d’autopsie, qui
ne répondait à aucune des normes venant d’être publiées, je décidais unilatéralement
de ne plus pratiquer d’autopsie dans ce local en raison des risques pour le
personnel et pour l’environnement. Une évaluation du coût nécessaire pour une
réhabilitation de la salle et sa mise en normes était effectuée : devant
le coût des travaux nécessaires, et compte tenu de la très faible activité,
l’administration décidait la fermeture définitive du local en 2007 et
s’orientait vers la délocalisation de l’activité sur un autre site. La première
hypothèse retenue était le transfert vers le site Est des Hospices Civils de
Lyon, bien équipé pour l’activité autopsique (salle aux normes, accès à un P3,
...) et réalisant un nombre d’actes encore significatif dans ce domaine,
notamment en neuropathologie ; cette solution se heurtait à une difficulté
administrative : bien qu’appartenant à la même institution, l’hôpital
Edouard Herriot et le site Est sont en effet situés dans deux communes
différentes, ce qui compliquait le transport des corps. La solution finalement
retenue était la réalisation des autopsies scientifiques de l’hôpital Edouard
Herriot par l’Institut Médicolégal de Lyon (IML), localisé juste en face et
bénéficiant d’infrastructures récemment rénovées et parfaitement aux normes.
Une convention a été passée entre les deux institutions. Les demandes émanant
de l’hôpital Edouard Herriot sont gérées par le service d’anatomie pathologique
de l’hôpital ; après validation médicale et administrative de la demande,
le corps est transféré à l’IML ; l’acte autopsique est effectué par les
médecins légistes; l’analyse histologique des prélèvements tissulaires est
assurée par le service d’anatomie pathologique. L’IML reçoit une rétribution
financière pour chaque autopsie.
Depuis 2008, aucune
autopsie n’a plus été effectuée à l’hôpital Edouard Herriot. Entre 2008 et
2014, 4 demandes seulement ont abouti à la réalisation d’une autopsie
scientifique à l’IML, dans le cadre de la convention passée avec les Hospices
Civils de Lyon.
Pour conclure, Gustave
Roussy, où j’exerce désormais, ne pratique aucune autopsie et ne dispose
d’aucun local adapté. En cas de besoin, un transfert vers un autre site devrait
être envisagé.
L’extinction
de la pratique de l’autopsie d’adultes : quelles causes ?
Un certain nombre de
causes sont bien connues et sont illustrées par mon expérience personnelle, sur
laquelle je me suis volontairement étendu :
-
absence
de locaux aux normes, garantissant la sécurité du personnel et de
l’environnement, et absence de volonté et de moyens pour assurer leur
réhabilitation éventuelle, le faible nombre d’actes prévisibles ne justifiant
pas la lourdeur des dépenses à engager
-
absence
de personnel disponible et formé
o
la crise
démographique qui a frappé la spécialité d’anatomie pathologique a été aggravée
par l’augmentation, souvent considérable, de l’activité diagnostique dans le
secteur biopsique et par l’alourdissement des tâches du pathologiste dans la
plupart des secteurs diagnostiques (examens pré-analytiques pour la
pathologie moléculaire, tumorothèques, RCP, ...); en conséquence, le temps
susceptible d’être consacré à l’autopsie est voisin de zéro et les
pathologistes hésitent à engager des démarches ou des actions susceptibles
d’augmenter cette charge ; de plus, l’activité de la plupart des
pathologistes est désormais organisée en l’absence de toute contrainte liée à
d’éventuels examens autopsiques et il est difficile de concevoir de
réintroduire le « tour d’autopsie » dans la pratique quotidienne ...
o
le faible
nombre d’autopsies ne permet pas de former efficacement les jeunes pathologistes
à cette activité : un cercle vicieux s’est installé, qui fait courir le
risque de ne pas trouver de personnel correctement formé si la pratique des
autopsies augmente à nouveau
o
la
disparition des agents d’amphithéâtre laisse les pathologistes seuls pour
assurer l’ensemble de l’acte autopsique et entraîne un allongement de cet acte,
puisque leur incombent désormais la préparation et la restitution des corps,
par exemple.
D’autres causes sont
également impliquées ; j’ai été sensibilisé à certaines d’entre elles en
ayant participé, entre 2000 et 2005, à l’hôpital Edouard Herriot, à l’activité
et à la réflexion d’un groupe multidisciplinaire destiné à faire le bilan
annuel de l’activité autopsique (adultes, enfants et foetus), et donc concerné
au premier chef par la décroissance brutale et apparemment irréversible de
l’autopsie d’adultes. Un certain nombre d’éléments ont été identifiés:
-
en amont
de l’autopsie :
o
la
difficulté à poser l’indication d’un examen autopsique par les nouvelles
générations de cliniciens, pour qui l’autopsie ne fait plus partie de la
culture médicale (cercle vicieux comparable à celui évoqué plus haut pour les
pathologistes) : les indications ne sont plus celles de « l’ultime
examen complémentaire » ou du contrôle qualité ; elles sont très
largement dominées par la recherche de la cause d’une mort subite inexpliquée
en milieu hospitalier ou par la crainte d’une erreur médicale (ce qui amène
parfois à se poser la question si la demande d’autopsie est à caractère
scientifique ou à caractère médicolégal et quelle est la procédure la mieux
adaptée)
o
la
méconnaissance des procédures administratives de demande et des contraintes de
réalisation de l’acte par beaucoup de cliniciens
o
le manque
d’habitude de la plupart des cliniciens à la pratique de l’obtention de
l’accord des familles (comment annoncer la demande ? comment justifier son
intérêt ? comment obtenir l’accord de la famille ? comment expliquer
les démarches ? comment expliquer les conséquences sur la récupération du
corps ? comment éviter la confusion avec l’autopsie médicolégale, seule
connue du grand public ? comment éviter de laisser penser à la peur d’une
erreur médicale ?)
o
le
découragement dû à la fréquence des échecs : beaucoup de demandes échouent
non pas devant l’opposition de la famille (ou du défunt) à l’autopsie elle-même
mais devant les conséquences éventuelles du retard apporté à la récupération du
corps (l’autopsie repousse le délai de récupération, d’autant plus que
l’autopsie elle-même est souvent repoussée faute d’avoir pu joindre la famille
immédiatement et faute d’avoir pu engager rapidement la procédure
administrative de demande)
o
le risque
de perdre, dans un avenir proche, les quelques agents administratifs encore
formés aux procédures de demande d’autopsie (toujours le même cercle
vicieux) ; dans mon expérience, les gouvernances de nos institutions
hospitalières ont d’ores et déjà souvent tendance à confondre autopsie
scientifique et autopsie médicolégale et à ne pas saisir le rôle joué par
l’autopsie scientifique dans la pratique médicale
-
au cours
de l’autopsie
o
contrairement
aux « pratiques d’antan », il est rare de pouvoir mobiliser, faute de
temps (et probablement aussi en raison d’autres réticences ...), un clinicien
au courant du dossier du patient pour une discussion anatomoclinique efficace
lors de l’examen ; l’expérience montre pourtant que, dans certaines
indications (notamment les décès post-opératoires), la présence d’un chirurgien
est essentielle au succès de l’examen autopsique
-
en aval
de l’autopsie
o
l’absence
de valorisation médicale de l’examen : seuls de rares services
maintiennent la tradition des réunions de mortalité/morbidité qui étaient un
des moyens les plus efficaces de démontrer tout l’intérêt de l’examen
autopsique dans le contrôle de la qualité de la prise en charge des patients
o
l’absence
de valorisation scientifique : très peu d’articles sont consacrés à
l’intérêt de l’autopsie scientifique aujourd’hui (y compris dans les pays ayant
le mieux maintenu cette tradition, comme les pays germaniques) ; une
conséquence pratique de ce silence de la littérature est la difficulté d’étayer
un dossier concernant la pratique et l’intérêt de l’autopsie sur des données
objectives et fiables (quelques données relativement récentes sur les pratiques
de certains sites français figurent dans les références suivantes : Ann Pathol 2009;29:4-19 et Ann Pathol 2007;27:269-83)
o
l’absence
de valorisation financière : l’autopsie de foetus est inscrite à la
nomenclature des actes médicaux (mais la somme perçue par le pathologiste est
très faible, de l’ordre de 60 euros pour une autopsie simple) ; l’autopsie
d’adultes n’y est pas : elle est inscrite à la nomenclature dite de
Montpellier et donc « valorisable » sous forme de MERRI, ce qui ne
représente toutefois pas une incitation forte, compte tenu de l’opacité de ce
financement et de ses faibles retombées concrètes pour les services concernés
...
Suggestions :
1. Le point clé est évidemment
la disponibilité en personnels formés et en locaux adaptés. Il n’est pas
envisageable, compte tenu des compétences à mobiliser et des financements à
engager, de maintenir (ou de réactiver) une activité d’autopsie dans tous les
sites hospitaliers
2. Une hypothèse pourrait être celle
de plateaux multidisciplinaires à dimension régionale
- réunissant pathologistes et médecins légistes, susceptibles de partager leurs compétences réciproques (l’intérêt de la mutualisation des compétences a été illustrée par des travaux récents, y compris français ; voir par exemple, les expériences d’Amiens (Ann Pathol 2012;32:4-13) et de Toulouse (Ann Pathol 2013;33:87-92)
- aidés par du personnel formé, équivalent des prosecteurs existant dans d’autres pays, capables de réaliser les actes techniques de prélèvement, permettant aux pathologistes d’intervenir seulement au stade de l’examen macroscopique : il s’agirait à la fois d’un important gain de temps mais aussi d’une organisation plus fonctionnelle, susceptible d’entrer plus facilement dans le « work flow » quotidien du pathologiste
- disposant des équipements techniques nécessaires et de la possibilité de réaliser toute la gamme des examens complémentaires requis
- pouvant bénéficier de techniques et de temps radiologiques pour la réalisation d’autopsies « virtuelles », capables de cibler et de guider l’examen autopsique proprement dit, voire de l’éviter dans certaines situations
3. Ces actes devraient être valorisés médicalement, financièrement et scientifiquement
- redéfinition des indications de l’autopsie dans la pratique médicale actuelle et dans le cadre de l’accréditation hospitalière
- valorisation des données obtenues par un rapport national annuel (nombres d’autopsies, diagnostics retenus, diagnostics rectifiés, diagnostics découverts ...), pouvant donner lieu à des publications, sur le mode de ce que fait l’Institut National du Cancer (INCa) pour les infrastructures financées par l’INCa et la DGOS (tumorothèques, plateformes de génétique moléculaire, laboratoires d’oncogénétique, ...)
- mise en place de programmes scientifiques incitatifs et structurés (exemple potentiel en cancérologie: utilisation de l’examen autopsique pour la réévaluation de l’histoire naturelle des tumeurs, le suivi des effets des traitements, l’étude de l’hétérogénéité tumorale, la recherche d’effets secondaires méconnus ... ; programmes à discuter éventuellement avec l’INCa, les EPST et les associations de patients)
- obtention de postes médicaux et
paramédicaux dédiés (comme pour la foetopathologie il y a une dizaine d’années)
et d’une véritable rétribution proportionnelle au temps passé, aux compétences
requises et aux équipements nécessaires
Annexe 8 : l’autopsie virtuelle remplacera-t-elle l’autopsie
classique ?
Pr G. GORINCOUR (1) – Pr J.F MEDER
(2)
(1) Laboratoire
d’Imagerie Interventionnelle et Expérimentale (LIIE – EA 4264), CERIMED, Campus
Santé, 37 Bd jean Moulin 13005, Aix-Marseille Université
(2)
Service
d’Imagerie, Hôpital Sainte Anne, Paris
On peut définir l’autopsie virtuelle
comme la réalisation d’une autopsie sans dissection du corps grâce à la
combinaison de diverses techniques d’imagerie dont l’imagerie à résonnance
magnétique (IRM) et le scanner. L’idée d’associer l’imagerie médicale aux
enquêtes médico-légales vient du
professeur de radiologie Gil Brogdon de l’Université de l’Alabama du
Sud, mais la première utilisation thanatologique du scanner nous vient de
l’institut de médecine légale de Berne
(Suisse). Selon son créateur Michael Thali, le néologisme
« virtopsy » est la contraction de « virtual » (du latin virtualis) et de « autopsy » :
il s’agit de réaliser une autopsie virtuelle sans avoir recours au scalpel. Il
s’agit aussi (virtualis :
utilisable, industriel, meilleur) d’améliorer la qualité de l’acquisition des
informations en médecine légale. Là où l’autopsie propose de « voir
soi-même », la Virtopsy vient en complément pour « mieux voir »
et orienter l’autopsie.
Avantages par rapport à
l’autopsie
- non destruction de preuves ou d’indices qui pourraient être
endommagés à l’autopsie classique dans le cadre des autopsies médico-légales.
- possibilité de « recommencer » l’examen virtuel,
ce qui représente un avantage considérable par rapport à l’autopsie traditionnelle qui ne peut être
réalisée correctement qu’une seule fois. Les images pourront ainsi être
relues, remaniées et ré-analysées autant de fois que nécessaire (pas de limites
sur le nombre de reconstructions bi- et tri- dimensionnelles).
- dans le cadre des autopsies médicales, surmonter les
barrières religieuses et culturelles qui interdisent « le découpage »
des corps.
- création de fichiers numériques qui permettent plusieurs
utilisations telles que leur production devant un tribunal, le stockage
permanent, la possibilité de transférer ces images électroniquement et ainsi de
faciliter la communication entre les professionnels.
Il existe également des avantages
qui sont directement liés à la technique de l’autopsie virtuelle :
- Elle offre la
possibilité de permettre un recueil d’informations du corps entier en un temps
réduit et d’étudier des régions dont l’accès pour les autopsies classiques est
difficile voire impossible, et donc de réaliser ainsi une autopsie directement
sur les zones d’intérêt.
Cette vitesse dans
la réalisation pourrait par exemple être utilisée pour l’identification rapide
dans le cadre de catastrophe de masse.
- Cet examen
pourrait être utilisé dans des cas complexes comme les incidents de
bioterrorisme car il réduirait le risque de contamination des pathologistes et
des autres personnels médicaux, en évitant l’ouverture et la manipulation du
corps potentiellement contagieux. On peut généraliser ce contexte particulier à
l’ensemble des corps infectés, contaminés par des toxiques.
- L’examen TDM
s’avère également intéressant lors de l’étude des corps putréfiés (retrouvés
longtemps après le décès, ou après plusieurs jours en mer), carbonisés ou à
l’état de squelette, notamment dans le but d’identification de la personne et
de recherche de projectiles et de fractures squelettiques dans le cadre des
lésions produites par un tiers.
Limites pratiques
Une des principales limites de la
Virtopsy est représentée par le problème d’accessibilité et de disponibilité
des appareils d’imagerie. Si en Suisse le matériel est dédié, ce n’est pas
forcément le cas dans les autres pays. On citera également le problème lié au
surcoût que représente tout ce panel d’examens, d’autant plus qu’il reste
complémentaire aux examens déjà existants ; en France, environ 7000
autopsies sont réalisées chaque année. Le forfait technique (n’inclut pas la
forfaitisation intellectuelle de l’acte) pour un scanner étant d’une centaine
d’euros et environ le double pour une IRM, une systématisation de ces examens
constituerait donc un coût supplémentaire à celui des autopsies.
Perspectives
De notre expérience technique, scientifique
et organisationnelle issue de cette pratique depuis 2008, nous envisageons un
fonctionnement théorique « idéal » qui pourrait donner sa pleine
mesure à ces nouvelles approches, au service des patients, de la recherche et
de la prévention.
Ce fonctionnement s’appuierait sur
des centres multidisciplinaires regroupant médecins légistes, radiologues,
membres de la police judiciaire et de la police scientifique, spécialistes en
balistique, experts criminalistiques et toxicologistes, expert en identification,
ingénieurs et techniciens de l’image et de l’animation, mais aussi juristes,
philosophes, sociologues, éthiciens, etc…
Ces centres devraient dépendre à la
fois d’une instance universitaire et d’un établissement hospitalier, mais aussi
travailler en lien étroit avec des instances supérieures comme INTERPOL pour
les problèmes d’identification des victimes.
Ils devront posséder en leurs seins
toutes les techniques nécessaires à un fonctionnement optimal et à leur
valorisation scientifique :
-
méthode
d’imagerie tridimensionnelle de la surface du corps (photogrammétrie),
-
scanner
(CT) et angioscanner postmortem,
-
imagerie
et spectroscopie par résonnance magnétique (IRM et Spectro-IRM),
-
micro-IRM
et micro-CT,
-
dispositif
de biopsie percutanée guidée par imagerie,
-
fusion
de données de surface et de données radiologiques.
-
Autopsie
conventionnelle.
Ils auront pour mission de
poursuivre le travail de corrélations entre données autopsiques et
« virtuelles » afin de pouvoir conclure sur les rôles et limites de
chacun. Il auront également pour mission de promouvoir l’enseignement et la
recherche dans le domaine médicolégal mais aussi médico-scientifique, et ce
manière transdisciplinaire.
Remerciements à toute l'équipe
médicale et paramédicale, en particulier à Anthony GARBINO et Laura MARTINEZ
GONGORA, manipulateurs en imagerie médicale.
Annexe 9: textes législatifs et
réglementaires (analyse detaillée)
L’autopsie (données
réglementaires)
Marc DUPONT
Directeur d’hôpital Assistance
publique – hôpitaux de Paris
Au plan du droit, l’autopsie
médicale et l’autopsie scientifique réalisées en milieu hospitalier relèvent
aujourd’hui des textes régissant les prélèvements sur le corps d’une personne
décédée. Ils sont issus de la législation de bioéthique, en l’occurrence des
lois de bioéthique du 29 juillet 1994 et du 6 août 2004, et figurent à la fois
au Code civil et dans le Code de la santé publique.
Ce qu’a voulu le législateur
La loi poursuit en ce domaine deux
objectifs essentiels, a priori contradictoires et qui doivent être conciliés à
l'hôpital:
▪ d'une part, autoriser et faciliter
les prélèvements dès lors qu’ils ont pour but l’amélioration des diagnostics,
le progrès des connaissances médicales et cas échéant, le recueil et la
conservation d'échantillons humains utiles à la recherche.
Les prélèvements à visée
scientifique peuvent notamment contribuer, de façon déterminante dans certains
cas, à l'amélioration des diagnostics et au progrès des connaissances
médicales. Les personnes qui y consentent permettent notamment à ceux qui
seront atteints un jour d'une même maladie de bénéficier ultérieurement de
traitements plus efficaces.
▪ d'autre part,
protéger
le droit des personnes sur leur corps : « Chacun
a droit au respect de son corps » et « le corps humain est
inviolable » (art. 16-1, C. civil). La loi prévoit qu’« Il
ne peut être porté atteinte à l'intégrité du corps humain qu'en cas de
nécessité médicale pour la personne ou à titre exceptionnel dans l'intérêt
thérapeutique d'autrui » (art. L. 16-3, C. civil) et, sauf
dans certains cas d'exception qu'elle prévoit, elle impose à la fois le « respect dû aux morts » (art. 225-17 et
s., C. pénal) et celui de la volonté de
la personne.
L'article L. 1211-2 du Code de la
santé publique dispose ainsi que « Le prélèvement d'éléments du corps humain et
la collecte de ses produits ne peuvent être pratiqués sans le consentement
préalable du donneur. Ce consentement est révocable
à tout moment ».
Les
prélèvements à caractère médical ne sont donc autorisés que par exception au
principe d'inviolabilité du cadavre. Des prélèvements effectués en dehors de ce
cadre dérogatoire (on y ajoutera celui des investigations médico-judiciaires ou
effectuées après « don du corps ») porteraient une atteinte grave et
illicite au respect qui est dû au corps de toute personne décédée.
Le Conseil d'Etat, dans un arrêt
important (arrêt Milhaud, 18 juin 1993), a établi un lien direct entre le
respect dû au cadavre et le principe de dignité, protégé par la Constitution.
La première loi de bioéthique du 29 juillet 1994 a de même affirmé que le
progrès scientifique et la technique médicale ne devaient jamais prendre le pas
sur la dignité de l’être humain. Et l’article 16 du Code civil énonce que
« La loi assure la primauté de la
personne, interdit toute atteinte à la dignité de celle-ci… ».
Si les juridictions françaises
s’étaient prononcées en ce sens à de nombreuses reprises à l’occasion de
diverses pratiques attentatoires à la dignité, il s’agissait initialement de la
dignité de personnes vivantes.
La loi n° 2008-1350 du 19 décembre
2008 relative à la législation funéraire a en revanche expressément consacré le
droit au respect du corps humain après la mort.
Désormais, l’article 16-1-1 du Code
civil énonce que « Le respect dû au
corps humain ne cesse pas avec la mort. Les restes des personnes décédées, y
compris les cendres de celles dont le corps a donné lieu à crémation, doivent
être traités avec respect, dignité et décence ». La loi a par ailleurs
complété l’article 16-2 du même code, afin de permettre au juge de prescrire
toutes mesures propres à empêcher ou faire cesser une atteinte illicite au
corps humain ou des agissements illicites portant sur des éléments et produits
du corps humain, « y compris après
la mort ».
Ces dispositions sont en pleine
conformité avec celles du Code de déontologie médicale, qui prévoit que :
« Le médecin, au service de l’individu et de la santé publique, exerce sa
mission dans le respect de la vie humaine, de la personne et de sa dignité.
Le respect dû à la
personne ne cesse pas de s’imposer après la mort »
(art. R. 4127-2, C. santé publique).
Des principes applicables à tous les
prélèvements
La loi comprend
un socle de dispositions qui sont communes aux prélèvements sur personne décédée,
qu’ils soient effectués dans une finalité thérapeutique (la greffe au bénéfice
d’autrui) ou dans une finalité scientifique.
Elle prévoit
principalement, que :
▪ « Le prélèvement d'organes
sur une personne dont la mort a été dûment constatée ne peut être effectué qu'à
des fins thérapeutiques ou scientifiques.
Ce prélèvement peut être pratiqué
dès lors que la personne n'a pas fait connaître, de son vivant, son refus d'un
tel prélèvement. Ce refus peut être exprimé par tout moyen, notamment par
l'inscription sur le registre national automatisé prévu à cet effet. Il est
révocable à tout moment.
Si le médecin n'a pas directement
connaissance de la volonté du défunt, il doit s'efforcer de recueillir auprès
des proches l'opposition au don d'organes éventuellement exprimée de son vivant
par le défunt, par tout moyen, et il doit les informer de la finalité des
prélèvements envisagés.
Les proches sont informés de leur
droit à connaître les prélèvements effectués.
L'Agence de la biomédecine est
avisée, préalablement à sa réalisation, de tout prélèvement à fins
thérapeutiques ou à fins scientifiques » (art. L. 1232-1, C. santé publ.).
▪ « Si
la personne décédée était un mineur ou un majeur sous tutelle, le prélèvement à
l'une ou plusieurs des fins mentionnées à l'article L. 1232-1 ne peut avoir
lieu qu'à la condition que chacun des titulaires de l'autorité parentale ou le
tuteur y consente par écrit.
Toutefois, en
cas d'impossibilité de consulter l'un des titulaires de l'autorité parentale,
le prélèvement peut avoir lieu à la condition que l'autre titulaire y consente
par écrit » (art. L. 1232-2, C. santé publ.).
▪ « Les
prélèvements à des fins scientifiques ne peuvent être pratiqués que dans le
cadre de protocoles transmis, préalablement à leur mise en œuvre, à l'Agence de
la biomédecine. Le ministre chargé de la recherche peut suspendre ou interdire
la mise en œuvre de tels protocoles, lorsque la nécessité du prélèvement ou la
pertinence de la recherche n'est pas établie » (art. L. 1232-3, C. santé
publ.).
▪ « Les médecins ayant procédé
à un prélèvement ou à une autopsie médicale sur une personne décédée sont tenus
de s'assurer de la meilleure restauration possible du corps » (art. L.
1232-5, C. santé publ.).
Les
prélèvements à but diagnostique ou scientifique
La
législation distingue deux catégories de prélèvements à but scientifique au
sens large :
▪ les autopsies « médicales », qui sont
pratiquées, en dehors du cadre de mesures d'enquêtes ou d'instruction
diligentées lors d'une procédure judiciaire (donc en dehors d'investigations
médico-légales), dans le but d'obtenir un diagnostic sur les causes du décès
(art. L. 1211-2, C. santé publ.). Il s'agit donc de prélèvements à visée
« diagnostique ».
▪ les
autres prélèvements à but « scientifique » (visés notamment à
l'article L. 1232-3, C. santé publ.). Il s'agit notamment de toutes les études
sur les organes et tissus malades : le prélèvement permet alors, par exemple,
d'analyser un organe ou tissu normal pour le comparer au même organe ou tissu
prélevé chez une personne malade.
Les
autopsies médicales, pour rechercher les causes de la mort et les prélèvements
scientifiques sur personne décédée constituent une activité médicale relevant
de la spécialité d’anatomie pathologique. Il n’en a pas toujours été ainsi, et
dans une époque plus ancienne de la médecine, des médecins cliniciens
procédaient eux-mêmes aux autopsies, sur le fondement de l’omnivalence du titre
de docteur en médecine, au lieu de les confier comme c’est le cas aujourd’hui à
leurs collègues anatomo-pathologistes .
Prélèvements
et autopsies
La
loi ne précise pas quel est le champ de la notion de « prélèvement ».
La volonté du législateur a en effet été de garantir un respect strict et
général du corps humain et, dans le cas présent, du cadavre, quels que soient
la nature et le volume des prélèvements :
▪ il
n'y a donc pas lieu d'effectuer une distinction et de pratiquer de façon
spécifique s’agissant des prélèvements à visée diagnostique effectués hors le
cadre d'une autopsie ;
▪ la
loi s'applique ainsi sans particularités lorsque les prélèvements n'entraînent
aucune dégradation apparente du corps : ponctions de liquide par aiguille ou
cathéter, biopsies de peau, biopsies à l'aiguille ou au trocart au besoin sous
laparoscopie des viscères profonds, biopsies par simple boutonnière cutanée ou
incision cutanée de fragments d'organes (foie, rein, rate, myocarde, etc.). Les
prélèvements de tissus et de produits humains sur des personnes décédées pour
la constitution de "banques" (tumorothèques, sérothèques…) relèvent
des mêmes dispositions.
Le
consentement à l’autopsie médicale.
L'autopsie
« médicale » a pour objet de rechercher la cause de la mort du
patient (son but est « d’obtenir un diagnostic sur les causes du
décès », art. L. 1211-2, C. santé publ.). Son rôle est important pour
améliorer la pratique médicale et la veille sanitaire. Elle permet notamment
d’identifier des erreurs diagnostiques et de les prévenir chez d’autres
patients.
Elle
doit être pratiquée conformément aux exigences générales de recherche du
consentement aux prélèvements sur personnes décédées (prévues par les articles
L. 1232-1 et L. 1232-2, C. santé publ., v. ci-dessus). Il ne saurait être admis
que la volonté de la personne soit ignorée ou que, par exemple, la volonté des
proches puisse s’y substituer. Cette volonté, comme cela vient d’être indiqué,
est présumée. Elle doit donc être vérifiée par la recherche d’un éventuel refus
exprimé du vivant de la personne.
L’intérêt
de l’autopsie médicale pour la santé publique est dans certains cas si
déterminant que la loi a prévu, « à titre exceptionnel » et par
dérogation au principe du consentement présumé, que les autopsies médicales
puissent être réalisées malgré l’opposition de la personne décédée « en
cas de nécessité impérieuse pour la santé publique et en l’absence d’autres
procédés permettant d’obtenir une certitude diagnostique sur les causes de la
mort » (art. L. 1211-2, C. santé publ.).
Un
arrêté du ministre chargé de la santé (non publié à ce jour) doit venir
préciser les pathologies et les situations justifiant la réalisation des
autopsies dans ces conditions (même art.).
Ces
dispositions dérogatoires ont notamment été prévues dans la perspective du
diagnostic de la maladie de Creutzfeldt-Jakob.
Conditions générales des
prélèvements à visée scientifique
Pour la réalisation d'un prélèvement
à but diagnostique ou scientifique sur personne décédée, sept conditions
principales doivent être remplies :
▪ le prélèvement ne peut être effectué sans vérification de
l'absence de refus exprimé par le patient de son vivant,
▪ il ne peut être effectué qu'après qu'a été établi un
procès-verbal de constat de la mort spécifique, indépendant du certificat de
décès (art. L. 1232-1, C. santé publ.),
▪ les médecins qui établissent le constat de la mort, d'une
part, et ceux qui effectuent le prélèvement, d'autre part, doivent faire partie
d'unités fonctionnelles ou de services distincts (art. L. 1232-4, C. santé
publ.),
▪ le médecin doit informer les proches de la finalité des
prélèvements envisagés (art. L. 1232-1, C. santé publ.),
▪ les médecins ayant procédé au prélèvement doivent
s'assurer de « la meilleure restauration possible du corps » (art. L.
1232-5, C. santé publ.),
▪ les proches doivent être informés de leur droit à
connaître les prélèvements effectués (art. L. 1232-1, C. santé publ.),
▪ l'Agence de la biomédecine doit être avisée du
prélèvement avant qu'il ne soit effectué (même article).
Contrairement
à l'activité de prélèvements à but thérapeutique, l'activité de prélèvements à
visée diagnostique ou scientifique n'est pas soumise à un régime d'autorisation
administrative et peut donc être exercée librement par les établissements de
santé, dès lors que sont respectées les règles de protection des personnes
(consentement, anonymat), ainsi que d'hygiène et de sécurité du travail.
Prélèvements dans le cadre d’une
recherche
Il se rajoute une huitième condition
pour les prélèvements à but scientifique (hors les autopsies médicales): le
Code de la santé publique prévoit que tout établissement ou organisme qui
envisage de procéder à une recherche nécessitant le recours à un organe, à des
tissus ou des cellules prélevés sur une personne dont la mort a été dûment
constatée doit adresser au directeur général de l’Agence de la biomédecine,
sous pli recommandé avec demande d’avis de réception, un protocole comprenant
notamment une description du programme de recherche ainsi que la nature et le
nombre des prélèvements envisagés (art. R. 1232-15, C. santé publ.).
Ce protocole doit être inclus dans
un dossier dont la forme et le contenu sont fixés par un arrêté ministériel du
16 août 2007 (JO du 18 août 2007) : il doit comprendre notamment l’objet, le
titre et la durée des protocoles de recherche, l’identification du déclarant et
des participants au protocole ainsi que leurs titres et qualité, la nature des
prélèvements envisagés, les éléments permettant de s’assurer du respect des
conditions légales et réglementaires des prélèvements.
La mise en œuvre du protocole peut
débuter à l’expiration d’un délai de deux mois suivant la délivrance d’un
accusé de réception par l’Agence de la biomédecine, sauf décision
d’interdiction par le ministère de la Recherche auquel l’Agence est tenue
d’adresser le dossier (art. R. 1232-17, C. santé publ.).
L’hôpital ou l’organisme concerné
doit être en mesure de fournir à tout moment, à la demande du ministère de la
Recherche ou de l’Agence de la biomédecine le nombre et la nature des organes,
tissus ou cellules prélevés, la date et le lieu de prélèvement, les documents
attestant l’absence d’opposition ou l’existence du consentement au prélèvement,
ainsi que l’état d’avancement de la recherche sur les éléments de corps humain
prélevés (art. R. 1232-20, C. santé publ.).
La loi prévoit par ailleurs que le
ministre chargé de la recherche peut suspendre ou interdire la mise en œuvre de
ces protocoles lorsque la nécessité du prélèvement ou la pertinence de la
recherche n'est pas établie (art. L. 1232-3, C. santé publ.).
Le don
du corps à la science
Les
dispositions relatives aux prélèvements à but thérapeutique ou scientifique
doivent être distinguées de celles concernant les dons de corps à un
établissement de santé, de formation et de recherche (don du corps « à la
science »).
Le don du corps
est fondé sur la volonté d’une personne, en pleine maitrise de ses facultés
intellectuelles, de donner son corps. Il est admis que le don du corps,
lorsqu'il est exprimé selon les dispositions réglementaires (carte de
donateur…), vaut témoignage de la part de la personne de son absence
d'opposition à un prélèvement, qu'il soit à visée thérapeutique ou
scientifique.
Dans ce cas, la
personne ayant de son vivant exprimé le souhait de donner son corps à un
établissement déterminé, il est indispensable, pour tout prélèvement à visée
thérapeutique ou scientifique, de vérifier auprès de l'établissement légataire
la volonté exprimée par le défunt et de l'informer des modalités du prélèvement
envisagé.
Le
« don du corps » - Article R. 2213-13, C. collectivités territoriales
Un
établissement de santé, de formation ou de recherche ne peut accepter de don de
corps que si l'intéressé en a fait la déclaration écrite en entier, datée et
signée de sa main. Cette déclaration peut contenir notamment l'indication de
l'établissement auquel le corps est remis.
Une
copie de la déclaration est adressée à l'établissement auquel le corps est
légué ; cet établissement délivre à l'intéressé une carte de donateur, que
celui-ci s'engage à porter en permanence.
L'exemplaire
de la déclaration qui était détenu par le défunt est remis à l'officier d'état
civil lors de la déclaration de décès.
Après
le décès, le transport est déclaré préalablement, par tout moyen écrit, auprès
du maire de la commune du lieu de décès ou de dépôt. La déclaration est
subordonnée à la détention d'un extrait du certificat de décès (…) attestant
que le décès ne pose pas de problème médico-légal et que le défunt n'était pas
atteint d'une des infections transmissibles figurant sur l'une des listes
mentionnées à l'article R. 2213-2-1 du CGCT.
Les
opérations de transport sont achevées dans un délai maximum de quarante-huit
heures à compter du décès.
L'établissement
assure à ses frais l'inhumation ou la crémation du corps réalisée sans qu'il
soit nécessaire de respecter les conditions prévues à l'article R. 2213-33 ou
à l'article R. 2213-35
du CGCT.
Ces
dispositions sur le don du corps sont sommaires et très curieusement, cette
destination du corps humain pour des activités de recherche ne figure ni dans
la législation de bioéthique, ni dans celle de la recherche biomédicale.
Ce
dispositif du don du corps mériterait manifestement d'être reprécisé pour être
intégré aux dispositions générales sur le respect du corps humain et aux
conditions d'utilisation à visée médicale des corps humains (et des éléments de
corps humain).
Il
pourrait être le support à des dispositions nouvelles, peu distinctes au fond
du cadre règlementaire actuel, permettant à un patient de donner telle ou telle
partie de son corps (par ex. le cerveau) à telle ou telle institution. Une
carte de donateur spécifique en témoignerait.
L’examen du cadavre sans prélèvement
La réalisation, à visée
diagnostique, d' « autopsies virtuelles par voie radiologique » (ou
« virtopsies ») semble appelée à se développer. L'examen du cadavre
par imagerie ne présente pas de caractère invasif, n'est pas un prélèvement, et
ne constitue pas, a priori, une atteinte à l'intégrité du cadavre. Les
dispositions sur les prélèvements ne s'appliquent donc pas stricto sensu et
d'ailleurs, il n'existe aucune disposition légale ou réglementaire qui prévoit
ou organise ce type d'examens.
S'il est envisagé d'y procéder, on
considérera que les précautions doivent être prises :
▪ en informer les proches (réalisation et finalité des examens), par
parallélisme avec les obligations légales d'information existant en matière
d'autopsie,
▪ ne pas procéder aux examens s'il ressortait du témoignage des proches que
le patient de son vivant n'aurait pas admis le principe de réalisation de tels
examens,
▪ procéder aux examens sans que cela ait des effets sur l'intégrité du
cadavre, perturbe de façon anormale le déroulement ou le calendrier des
opérations funéraires et enfin, sans qu'il y ait atteinte à la dignité du corps
ou une forme d'indécence (hypothèse où, pour les besoins de l'examen
radiologique, le corps ferait l'objet de manipulations jugées indignes ou
choquantes de telle ou telle manière).
Le compte rendu
de l’ « autopsie virtuelle » devrait bien entendu figurer au
dossier médical.
Délai pour procéder au transport
Un des obstacles souvent affirmé à
la réalisation des autopsies médicales résulte des formalités et délais de
transport des corps.
Ces contraintes ont été assouplies
récemment, mais constituent manifestement un frein dans un cadre général dans
lequel les centres pratiquant les autopsies sont devenus bien moins nombreux et
où le corps peut difficilement être acheminé en retour, après l’autopsie, sur
le site hospitalier du décès dans les délais réglementaires.
Les opérations
de transport de corps avant mise en bière du corps d'une personne décédée
doivent être achevées dans un délai maximum de 48 heures à compter du décès
(Code général des collectivités territoriales; art. R. 2213-11). Ce délai doit
être strictement respecté.
Il ne peut être dérogé à ce délai de
48 heures que pour les transports sans mise en bière effectués pour réaliser
une autopsie en vue de diagnostiquer certaines infections transmissibles (C.
gén. coll. terr., art. R. 2213-14 ). Dans ce cas, le délai est porté à 72
heures.