Pour la première fois, un colloque consacré à la Recherche
en France dans le domaine de l’origine développementale de la santé et des
maladies, (DOHAD), fondement d’une médecine en devenir, s’est tenu à Paris les
8 et 9 novembre derniers à l’initiative de la "Société Francophone pour la recherche et l'éducation
sur les Origines Développementales, Environnementales et Epigénétiques de la
Santé et des Maladies"SF-DOHAD (www.sf-dohad.fr)
créée le 24 janvier 2012. Ce colloque s’adosse à la démarche récente des
Nations Unies de prescrire de nouvelles priorités d’action en incorporant cette
perspective développementale, jusqu’alors ignorée, pour faire face à la crise
mondiale de maladies chroniques, de manière plus globale.
Tout ce que nous respirons, mangeons et buvons, notre
activité physique, notre stress..., a un impact non seulement sur notre santé
mais peut également se répercuter sur la santé de nos futurs enfants, voire de
nos petits-enfants. Cette transmission d’informations concerne la future mère
comme le futur père. Elle passe en particulier par un étonnant mécanisme de
contrôle de l’expression des gènes, l’épigénétique.
Le colloque, qui a rassemblé des spécialistes de
disciplines variées mais explorant tous l’origine développementale de la santé,
a permis de bien comprendre les enjeux pour la société de cette nouvelle
approche et les défis posés à la recherche
Nous connaissions tous la génétique cette science qui
explique comment nous transmettons à nos enfants un ensemble de caractères «
innés », de la simple couleur des yeux jusqu’à certaines maladies dites « de
famille ». Ces informations sont gravées dans le marbre de notre ADN, représentent
le « hardware », et se transmettent par les gènes, d’une génération à l’autre.
Si toutes nos cellules contiennent les mêmes gènes, tous ne
s’expriment pas nécessairement. Selon le stade, l’âge, le sexe, le tissu mais
aussi l’environnement au sens large seul un assortiment de gènes s’expriment.
Depuis une trentaine d’années, on étudie les mécanismes qui contrôlent l’expression
des gènes: « L’épigénétique » - EPI, « au-dessus » en grec – qui
explique comment certaines marques épigénétiques en s’apposant sur la
molécule d’ADN, modifient l’activité des gènes, constitue un mécanisme
universel partagé par l’ensemble du monde du vivant et représente donc le «
software ».
Ainsi, contrairement aux mutations de l’ADN, ces marques épigénétiques
ne sont pas « gravées dans le marbre ». Elles sont par nature malléables et
donc sensibles à tout type de facteurs environnementaux. Si, pendant la
grossesse, voire avant la conception, l’un des parents (ou les deux) est exposé
à un environnement délétère (alimentation déséquilibrée, tabac, stress,
pollution etc.), des altérations, des marques épigénétiques permettront d’archiver
sur les gènes des enfants, voire des petits-enfants, la mémoire de ces impacts,
modulant l’expression des gènes et impliquant des conséquences durables sur
leur santé physique et mentale. Ainsi par exemple, alors qu’il demeure
incontestable qu’une des contributions majeures au développement de l’obésité
revient à notre style de vie sédentaire et à un déséquilibre nutritionnel, excédentaire,
et au patrimoine génétique hérité de nos parents, il est apparu clairement qu’une
susceptibilité accrue à un environnement obésogène pouvait aussi être transmise
par le biais d’influences non génétiques archivées dans des marques épigénétiques
provenant aussi bien de la mère que du père.
La réversibilité des mécanismes à la base de la DOHAD
permet d’envisager des mesures préventives, d’autant plus efficaces qu’elles
seraient précoces. Ainsi les efforts consentis aujourd’hui sur le mode de vie,
la nutrition… devraient être payants pour la génération à venir et les
suivantes.
Ce sont toutes ces voies novatrices et étonnantes, des
causes et des conséquences des marques épigénétiques, jusqu’aux pistes de
recherche qu’elles suscitent, qui furent au cœur du colloque organisé par la
SF-DOHAD et soutenu par Aviesan, (Alliance nationale des sciences de la vie et
de la santé), l’INSERM, le CNRS, l’INRA, et l’Institut Lasalle Beauvais.