Tribune de Gilles Djeyaramane pour France Antilles reproduite avec l'aimable autorisation de son auteur.
Deux ans après la terrible explosion de 2 750 tonnes de nitrate d’ammonium dans le port de Beyrouth qui a détruit une partie de sa capitale le Liban serait bien inspiré de se rapprocher de l’espace francophone aussi bien sur les champs sociaux et culturels que politiques et économiques.
4 août 2020 une explosion d’une ampleur sans précédent, un des plus grande drame (d’ordre non militaire ou nucléaire) secouait le pays du Cèdre et détruisait une partie de Beyrouth. Un bilan très lourd : plus de 200 morts et 6500 blessés…
Durant plusieurs jours voire plusieurs semaines, les images filmées et diffusées par de nombreuses équipes de télévision internationales se propageaient à travers le monde et faisaient de nous des libanais de coeur.
La France au secours du Liban
Dès les premières heures de la catastrophe les autorités françaises sous l’impulsion du président Emmanuel Macron se sont portées au secours du peuple libanais.
Si le Président Macron s’implique fortement dans la gestion médiatique de la crise, le gouvernement français débloque des moyens matériels et humains considérables .
C’est un véritable pont aérien qui a été mise en place par la France. Dons de matériel, de médicaments, de produits alimentaires, mise à disposition de postes sanitaires de secours d’urgence et de secouristes… Le communiqué de presse officiel du gouvernement français rappelait que cette « mobilisation exceptionnelle de tous les acteurs français a pour but d’apporter une assistance d’urgence aux Libanais dans des secteurs prioritaires, en particulier le domaine médical, l’éducation, la réhabilitation des logements et des infrastructures et l’aide alimentaire ».
Une gestion fortement contestée de la catastrophe
Nombreux sont les libanais vivant au Liban ou expatriés qui clament leur mécontentement de la gestion de la crise, de l’enquête et de la reconstruction.
Le 3 juillet dernier dans une tribune publiée par un grand quotidien français, la directrice France Human Rights Watch, Bénédicte Jeannerod et la chercheure Aya Majzoub exprimaient leur désarroi et appelaient ouvertement le président français à la rescousse. De plus, ce 3 août , un an après l’explosion, l’ONG Human Rights Watch publiait un rapport accusant les responsables libanais d’entrave à l’enquête.
Le Liban doit continuer à affirmer son appartenance pleine et entière à l’espace francophone
La population libanaise aussi bien de nationalité libanaise que les membres de la diaspora constitue un acteur majeur économique de l’espace francophone.
Ses membres occupent dans de nombreux pays des postes à responsabilités dans de nombreux secteurs (commerce, construction-BTP, finances, transports, champs medical, etc) mais également dans l’élite politique et culturelle ( journalistes, avocats, écrivains, conseillers et stratèges politiques…). On pourra citer à titre d’illustration les familles Salamé ou Bourgi…
Plusieurs événements récents méritent d’être soulignés aussi bien sur le plan culturel qu’institutionnel.
Ainsi, c’est à l'unanimité que l'Académie française a décerné, la « Grande médaille de la francophonie » à L'Orient-Le Jour, « un journal qui ouvre des fenêtres lumineuses sur le reste du monde afin que sa jeunesse puisse respirer le grand air » selon les déclarations de Dany Laferrière, membre de l’Académie. La Grande médaille de la francophonie récompense ceux qui participent au rayonnement de la langue française dans le monde. Elle a été notamment décernée par le passé au chanteur belge Stromae .
Déjà en 2021, l'écrivain franco-libanais, Alexandre Najjar, avait été récompensé par le « Grand Prix de la Francophonie décerné par l'Académie ».
Des distinctions qui au delà de la littérature récompensent une vision humaniste et universaliste du monde.
Au niveau institutionnel et citoyen, on notera les propos récents d’Arnaud Ngatcha l'adjoint à la maire de Paris en charge de l'Europe, des relations internationales et de la Francophonie « nous menons des actions concrètes. Lors de l'explosion sur le port de Beyrouth le 4 août 2020, nous sommes passés par l'AIMF (Association Internationale des Maires Francophones) pour participer au financement de la reconstruction de l'Hôtel Karantina de Beyrouth (...) Nous avons aussi des accords de ville à ville qui permettent d'apporter des solutions souples et rapides » ».
Enfin, l’Organisation Internationale de la Francophonie va ouvrir cette année une représentation à Beyrouth. Nul doute que sa secrétaire générale, la Rwandaise Louise Mushikiwabo aura à cœur d’en faire une entité aussi puissante et constructive qu’une ambassade amie.
Les libanais ont tout intérêt à tenir compte de leur appartenance à la famille francophone dans un monde multipolaire et interconnecté où il convient de cultiver son réseau et de rassurer ses alliés. Espérons également que cet arrimage à la Francophonie constituera une occasion de rappeler à certains responsables libanais l’importance de la lutte pour les droits de l’homme, contre le racisme ordinaire et l’esclavage moderne ou domestique.