Jadis,
on entendait parler de la une fois par an, à l'occasion de son
rapport public, celui qui permet toujours à nos confrères comme à nous-mêmes de
nous insurger avec délectation contre la gabegie dont les administrations
publiques sont coupables.
De
la rigueur calviniste d'un Pierre Joxe à la tonitruance verbale d'un Philippe
Seguin, la juridiction avait su développer une expression dont la rareté faisait
le poids, même si ses avis n'ont pas de caractère contraignant.
Aujourd'hui,
pour voir le Président de la Cour des Comptes, il est plus sûr de l'attendre sur
le plateau de BFM que dans son bureau de la rue Cambon et Didier Migaud
additionne depuis sa nomination en 2010 davantage de rapports dans ses 7
chambres que Rocco Siffreddi dans la sienne.
Que
la Cour se préoccupe des comptes publics, on ne saurait lui reprocher puisque
c'est précisément sa raison d'être. Mais, lorsqu'elle s'autorise à fixer des
orientations de santé, on peut se demander si elle ne sort pas très légèrement
de son rôle.
Son
dernier rapport sur les maternités, présenté vendredi à la Commission des
affaires sociales du Sénat - et surtout à la presse - est une parfaite
illustration de cette fâcheuse tendance.
En
demandant la fermeture de 13 maternités qui échappaient encore aux impératifs
d'activité régissant désormais l'offre de soins, la Cour invoque une réalité à
laquelle il faut effectivement mettre un terme : le médiocre 17ème
rang qu'occupe la France en matière de mortalité néonatale.
Qu'elle
l'attribue prioritairement à des lacunes de sécurité imputables aux petites
structures est simplement malhonnête car 20% d'entre elles ont été fermées en 10
ans et bien d'autres paramètres entrent évidemment en ligne de compte.
L'argument
est d'autant plus injuste que beaucoup des maternités visées sont mises en
difficulté par la fragilité de la présence médicale dans certaines zones,
considérées comme peu attractives et souvent déjà sinistrées en termes d'accès
aux soins.
Que
la Cour des Comptes s'occupe des comptes et le Ministère de la Santé de la
santé. Dans une logique de rationalisation, les magistrats de la rue Cambon
devraient souscrire à la proposition.
Jacques
DRAUSSIN