Coup de
théâtre dans la négociation conventionnelle: les mutuelles annoncent qu’elles vont financer l’augmentation de certains
actes opposables. Pour être précis, cette proposition ne vise pas les dépassements
de tarifs (qui font l’objet d’une autre discussion). Elle concerne bel et bien
les actes opposables.
En clair, les Mutuelles vont se substituer à l’Assurance
Maladie pour rémunérer certains médecins spécialistes. Il s’agit donc d’une modification
essentielle des fondements de la Sécurité sociale, de notre système de santé et
de son financement solidaire sans débat ni prospective. Le syndicat
historique des médecins, tout heureux des quelques euros que les médecins récupèreront,
se félicite bruyamment de ce changement.
Dans le même temps, les
mutuelles entendent obtenir la possibilité de conventionner les professionnels
de santé, dont les médecins en échange de cet effort. Une proposition de loi*
vient opportunément d’être déposée pour permettre ce conventionnement par voie
législative.
L’effort consenti par les
mutuelles est d’abord celui de leurs adhérents qui vont cotiser davantage.
Contrairement aux cotisations à l’Assurance Maladie qui sont proportionnelles
aux revenus, les cotisations des complémentaires sont les mêmes quel que soit
le revenu. Ce qui modifie le niveau de cotisations, ce sont les prestations
prises en charge, plus importantes pour une cotisation plus chère. Au final, à
moins d’une investigation poussée auprès de la mutuelle concernée, rares sont
ceux qui savent vraiment comment leurs dépenses de santé sont couvertes ni non
plus quels sont les frais de gestion de ladite mutuelle.
La promesse de la FNMF s’élève à
150 millions d’euros sur les actes de quelques spécialités médicales. Ce n’est
pas cher payé pour acquérir les clés du conventionnement des professionnels.
Tempérons l’engouement des syndicats médicaux pour ce « plat de
lentilles » en rappelant que ni l’UNOCAM ni la FNMF, n’engagent leurs
membres. Surtout, si une telle mesure arrive à son terme, il n’est sans doute
pas inutile de rappeler à leurs mandants et, de manière générale à l’ensemble
des professionnels de santé, qu’ils se trouveront très vite face à des milliers
d’assureurs qui discuteront pied à pied les prix de chacun de leurs actes.
Bienvenue dans le monde des carrossiers agrées face aux voitures accidentées.
Du point de vue des usagers,
dont personne ne semble se soucier, ils seront réduits à une clientèle
captive des assureurs privés ou mutualistes et devront se faire soigner
dans le réseau de leur assureur en échange d’un meilleur remboursement. Les
malades deviennent ainsi eux-mêmes captifs et impacteront indirectement sur les
tarifs des médecins. Ils devront baisser leurs tarifs pour être choisis et conserver
leur patientèle. Les 150 millions seront donc un investissement particulièrement
rentable et avec une rapidité sans égale pour les assureurs.
Avant qu’il ne nous reste plus
que nos yeux pour pleurer, il reste à en appeler à nos élus, les parlementaires
nouveaux et anciens, auxquels nous avons en confiance donné mandat pour protéger
l’accès aux soins, la transparence des comptes et l’égalité devant l’impôt.
* Proposition de loi n° 296 visant à
permettre aux mutuelles de mettre en place des réseaux de soins, enregistrée à
la présidence de l'Assemblée nationale le 16 octobre 2012.
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