EDITO
Tu
t'es vu sans Cabu ?
Quelle
a bien pu être l'actualité santé de la semaine dernière ? S'il y en a eu, on ne
l'a pas vue. Après les terribles faits qui ont bouleversé le pays, ce qui nous
reste en mémoire, on le doit à ceux que l'on qualifie habituellement d'anonymes
lorsqu'ils défilent en nombre mais qui, dimanche, avaient tous un nom :
Charlie.
Phénomène
hélas provisoire et déjà dépassé, les polémistes aux petits pieds sont restés
silencieux ou couverts encore par le bruit du pas déterminé des foules géantes
battant le pavé.
Jusqu'aux
professionnels de la prévention qui, sans rien avoir à dire, auront été écoutés
au-delà de leurs espérances : marcher, c'est vraiment bon pour la santé des
cœurs et des têtes. Près de 4 millions de femmes, d'hommes et de familles ont pu
en témoigner.
Les
scientifiques cherchent depuis longtemps à savoir s'il existe un gène de la
violence mais également si un gène de l'humour ne pourrait pas marginalement
concerner quelques individus. Difficile à dire, mais on a déjà la réponse sur
leur compatibilité.
Une
seule certitude : le paradoxe et la dérision forment l'ADN de Charlie Hebdo qui
trouve dans la religion, la police, l'armée et le personnel politique une source
d'inspiration sans limite.
Vraiment
sans limite car ce sont ces religions, attaquées à la Kalachnikov par des fous
de dieu, qui revendiquaient dimanche le droit d'être griffées au crayon feutre
par des mécréants.
Ce
sont ces policiers et ces militaires, férocement croqués mercredi après mercredi
mais fugacement promues icônes de la République, que la foule applaudissait à
Paris.
Ce
sont ces chefs d'Etat et de gouvernement, si souvent caricaturés par des
dessinateurs aussi talentueux que vachards, qui venaient leur rendre hommage en
montrant simplement leur vrai visage.
Paradoxe
et dérision… Cabu – évoluant habituellement au milieu d'une bande de lurons peu
connus pour leur tempérance – avait accepté d'être l'illustrateur exclusif de
l'immense campagne de prévention « Un
verre ça va, trois verres bonjour les dégâts », dans laquelle son célèbre
Beauf ‘ donnait au slogan toute sa force et au message toute sa
pertinence.
Aujourd'hui,
ce n'est plus Bonjour les dégâts
mais Tu t'es vu sans Cabu et, on est
d'accord, ça n'a, définitivement, rien de drôle.
Jacques
DRAUSSIN
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