Billet d'humeur du Dr Christophe Prudhomme
🖊Billet d'humeur de la semaine du Dr Christophe Prudhomme
Pour un service public d’hélicoptères sanitaires
A la différence de nombreux pays, il n’existe pas en France de système public de secours sanitaire héliporté. Tout le monde connaît les hélicoptères de la gendarmerie et de la Sécurité civile pour le secours en montagne ou en mer et on aperçoit régulièrement les hélicoptères affectés au SAMU se poser dans les hôpitaux. Mais il existe une grande différence entre ces services, d’un côté il s’agit d’un service public, de l’autre ce sont des compagnies privées répondant à des appels d’offres. Par ailleurs la dotation d’un hélicoptère dans un SAMU ne relève pas d’un schéma national mais de l’initiative des responsables médicaux qui doivent monter un dossier et trouver des financements. De ce fait, la couverture du territoire est inégale et les moyens dépendent notamment de l’engagement ou non des collectivités locales, dont ce n’est normalement pas la mission, en termes de subventions. Ce mode de financement est d’ailleurs à l’origine d’inégalités territoriales flagrantes.
Dans ce contexte, il n’est pas étonnant que le système connaisse des ratés au détriment des patients. Ainsi, récemment, une société n’a pas été en capacité de fournir une machine de remplacement en Ille-et-Vilaine à la suite d’une défaillance technique, ce qui a entraîné plusieurs interruptions de service. Cette rupture de service est d’autant plus grave que la multiplication des fermetures de services d’urgence lors de certaines périodes rend le transport héliporté indispensable pour assurer une prise en charge optimale des patients, en particulier quand le facteur temps est celui qui a la plus grande influence sur le pronostic.
Un autre problème plus inquiétant est le mouvement social lancé par les pilotes et leurs assistants face à des conditions de travail et de rémunération indignes. En effet, les prestataires privés profitent du fait que la plupart des pilotes sont des anciens militaires qui touchent déjà une pension, pour leur verser des salaires très en-dessous ce qu’ils seraient en droit d’attendre au regard de leur qualification et de la pénibilité du métier.
Nous sommes donc face à une situation classique de sous-traitance où les prestataires minimisent leurs coûts d’investissement et de fonctionnement pour maximiser leurs bénéfices. C’est la raison pour laquelle, la CGT santé avec le syndicat des pilotes avait proposé, il a près de 15 ans, au responsable du Conseil national des urgences hospitalières nommé par R. Bachelot, de créer un service public d’hélicoptères sanitaires. La proposition, favorablement accueillie, était un plan de maillage du territoire avec un parc d’hélicoptères géré par la Sécurité civile et affecté aux SAMU. L’intérêt était de s’adosser à un service de l’État ayant une compétence dans le domaine pour assurer cette mission de service public en association avec l’autre service public que sont les SAMU. Malheureusement, cette proposition n’a connu aucune suite, mais elle est encore plus d’actualité face à la dégradation actuelle du service.
🔎Médecin au SAMU, Christophe Prudhomme est également le porte-parole de l'Association des médecins urgentistes de France. Il est également traducteur et auteur de nombreux ouvrages à destination des urgentistes.
Commentaires
Enregistrer un commentaire