Nora ANSELL-SALLES

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jeudi 18 octobre 2012

Dépassements de tarifs: grande embrouille et déconstruction de notre système de santé


Coup de théâtre dans la négociation conventionnelle: les mutuelles annoncent qu’elles vont financer l’augmentation de certains actes opposables. Pour être précis, cette proposition ne vise pas les dépassements de tarifs (qui font l’objet d’une autre discussion). Elle concerne bel et bien les actes opposables.

En clair, les Mutuelles vont se substituer à l’Assurance Maladie pour rémunérer certains médecins spécialistes. Il s’agit donc d’une modification essentielle des fondements de la Sécurité sociale, de notre système de santé et de son financement solidaire sans débat ni prospective. Le syndicat historique des médecins, tout heureux des quelques euros que les médecins récupèreront, se félicite bruyamment de ce changement.

Dans le même temps, les mutuelles entendent obtenir la possibilité de conventionner les professionnels de santé, dont les médecins en échange de cet effort. Une proposition de loi* vient opportunément d’être déposée pour permettre ce conventionnement par voie législative.

L’effort consenti par les mutuelles est d’abord celui de leurs adhérents qui vont cotiser davantage. Contrairement aux cotisations à l’Assurance Maladie qui sont proportionnelles aux revenus, les cotisations des complémentaires sont les mêmes quel que soit le revenu. Ce qui modifie le niveau de cotisations, ce sont les prestations prises en charge, plus importantes pour une cotisation plus chère. Au final, à moins d’une investigation poussée auprès de la mutuelle concernée, rares sont ceux qui savent vraiment comment leurs dépenses de santé sont couvertes ni non plus quels sont les frais de gestion de ladite mutuelle.

La promesse de la FNMF s’élève à 150 millions d’euros sur les actes de quelques spécialités médicales. Ce n’est pas cher payé pour acquérir les clés du conventionnement des professionnels. Tempérons l’engouement des syndicats médicaux pour ce « plat de lentilles » en rappelant que ni l’UNOCAM ni la FNMF, n’engagent leurs membres. Surtout, si une telle mesure arrive à son terme, il n’est sans doute pas inutile de rappeler à leurs mandants et, de manière générale à l’ensemble des professionnels de santé, qu’ils se trouveront très vite face à des milliers d’assureurs qui discuteront pied à pied les prix de chacun de leurs actes. Bienvenue dans le monde des carrossiers agrées face aux voitures accidentées.

Du point de vue des usagers, dont personne ne semble se soucier, ils seront réduits à une clientèle captive des assureurs privés ou mutualistes et devront se faire soigner dans le réseau de leur assureur en échange d’un meilleur remboursement. Les malades deviennent ainsi eux-mêmes captifs et impacteront indirectement sur les tarifs des médecins. Ils devront baisser leurs tarifs pour être choisis et conserver leur patientèle. Les 150 millions seront donc un investissement particulièrement rentable et avec une rapidité sans égale pour les assureurs.

Avant qu’il ne nous reste plus que nos yeux pour pleurer, il reste à en appeler à nos élus, les parlementaires nouveaux et anciens, auxquels nous avons en confiance donné mandat pour protéger l’accès aux soins, la transparence des comptes et l’égalité devant l’impôt.

 

* Proposition de loi n° 296 visant à permettre aux mutuelles de mettre en place des réseaux de soins, enregistrée à la présidence de l'Assemblée nationale le 16 octobre 2012.

Dépassements de tarifs: grande embrouille et déconstruction de notre système de santé


Coup de théâtre dans la négociation conventionnelle : les mutuelles annoncent qu’elles vont financer l’augmentation de certains actes opposables. Pour être précis, cette proposition ne vise pas les dépassements de tarifs (qui font l’objet d’une autre discussion). Elle concerne bel et bien les actes opposables.

En clair, les Mutuelles vont se substituer à l’Assurance Maladie pour rémunérer certains médecins spécialistes. Il s’agit donc d’une modification essentielle des fondements de la Sécurité sociale, de notre système de santé et de son financement solidaire sans débat ni prospective.

Le syndicat historique des médecins, tout heureux des quelques euros que les médecins récupèreront, se félicite bruyamment de ce changement.
Dans le même temps, les mutuelles entendent obtenir la possibilité de conventionner les professionnels de santé, dont les médecins en échange de cet effort. Une proposition de loi[1] vient opportunément d’être déposée pour permettre ce conventionnement par voie législative.

L’effort consenti par les mutuelles est d’abord celui de leurs adhérents qui vont cotiser davantage. Contrairement aux cotisations à l’Assurance Maladie qui sont proportionnelles aux revenus, les cotisations des complémentaires sont les mêmes quel que soit le revenu. Ce qui modifie le niveau de cotisations, ce sont les prestations prises en charge, plus importantes pour une cotisation plus chère. Au final, à moins d’une investigation poussée auprès de la mutuelle concernée, rares sont ceux qui savent vraiment comment leurs dépenses de santé sont couvertes ni non plus quels sont les frais de gestion de ladite mutuelle.

La promesse de la FNMF s’élève à 150 millions d’euros sur les actes de quelques spécialités médicales. Ce n’est pas cher payé pour acquérir les clés du conventionnement des professionnels. Tempérons l’engouement des syndicats médicaux pour ce « plat de lentilles »  en rappelant que ni l’UNOCAM ni la FNMF, n’engagent leurs membres. Surtout, si une telle mesure arrive à son terme, il n’est sans doute pas inutile de rappeler à leurs mandants et, de manière générale à l’ensemble des  professionnels de santé, qu’ils se trouveront très vite face à des milliers d’assureurs qui discuteront pied à pied les prix de chacun de leurs actes. Bienvenue dans le monde des carrossiers agrées face aux voitures accidentées.

Du point de vue des usagers dont personne ne semble se soucier, ils sont réduits à devenir une clientèle captive des assureurs privés ou mutualistes et devront se faire soigner dans le réseau de leur assureur en échange d’un meilleur remboursement. Les malades deviennent ainsi eux-mêmes captifs et impacteront indirectement sur les tarifs des médecins. Ils devront baisser leurs tarifs pour être choisis et conserver leur patientèle. Les 150 millions seront donc un investissement particulièrement rentable et avec une rapidité sans égale pour les assureurs.

Avant qu’il ne nous reste plus que nos yeux pour pleurer, il reste à en appeler à nos élus, les parlementaires nouveaux et anciens, auxquels nous avons en confiance donné mandat pour protéger  l’accès aux soins, la transparence des comptes et l’égalité devant l’impôt. Mesdames et Messieurs les Parlementaires, à vous de jouer pour donner une chance à notre système de santé en refusant cette proposition de loi.


[1] Proposition de loi n°296 visant à permettre aux mutuelles de mettre en place des réseaux de soins, enregistrée à la présidence de l’assemblée nationale le 16 octobre 2012.
Ce texte est également paru sur le blog :  www.martialolivierkoehret.net
Pour plus de renseignement, vous pouvez aussi vous rendre sur le site de l'association Soins Coordonnés: www.soinscoordonnes.fr