EDITO
Avant
l'heure, c'est pas l'heure
De
feux de cheminée en circulation alternée, de péages autoroutiers en réservoirs
hydrauliques, d'aéroports provinciaux en centrales nucléaires, Ségolène Royal a
déjà largement démontré ses capacités à prendre des positions, disons
originales, vis-à-vis de la vulgate écolo.
Avec
sa mise en question de l'heure d'été la veille d'un événement qui redonne chaque
année de la visibilité à la Journée du Sommeil, reconnaissons que la ministre a
fait fort.
Elle
a fait fort, mais a-t-elle tort ? L'instauration de cette mesure en 1976 était
censée permettre de réaliser de substantielles économies d'énergie en exploitant
à plein la luminosité avant le coucher du soleil. Aujourd'hui, ces économies
sont beaucoup moins évidentes. A grands coups de calculs très compliqués, la
plupart des experts français et internationaux sont même assez d'accord pour
constater que le gain énergétique est extrêmement limité par rapport aux
inconvénients suscités.
Les
plus virulents adversaires de l'heure d'été ne manquent pas d'arguments. Leur
nature est d'ailleurs parfois surprenante.
Par exemple, la chute sensible de la production laitière, due à un
décalage de l'horaire de traite et du stress que celui-ci entraine…
Plus
subtil ? L'imbroglio, au sein du secteur des transports internationaux utilisant
l'heure constante UTC, provoqué par des transports intérieurs dont la mise en place des horaires
de circulation d'été, puis d'hiver, ne coïncident jamais avec les dates de
changement d'heure.
Plus
populiste ? La baisse de sécrétion de la mélatonine (hormone du sommeil)
entrainant, non seulement une augmentation de la fréquence et de la gravité des
accidents cardiaques, mais aussi des accidents du travail et de la circulation.
On vous passe la progression du nombre de suicides, l'ambiance est déjà assez
lourde.
Aux
amateurs de corrélations sans cause, chères aux sociologues et aux
épidémiologistes, on livrera quand même cette ultime concordance qui n'a pas dû
échapper à Ségolène Royal : les dimanches de changement d'heure, les Français se
lèvent du pied gauche et votent à droite.
Jacques
DRAUSSIN