đŸ§” INTERVIEW ESCLUSIVE DE KATHERINE PRADEAU crĂ©atrice de mode



AVANT PROPOS 
CrĂ©atrice française reconnue, Katherine Pradeau se partage entre la France et le Niger, son pays d’adoption. 10 ans aprĂšs son premier voyage au pays des Touaregs, Katherine Pradeau a mixĂ© avec bonheur et talent les deux cultures.

Le résultat : une mode parisienne réinterprétée avec les techniques ancestrales des artisans touaregs.

Une belle aventure  au Burkina Faso  avec @ferielberraiesguigny
@unitedfashionforpeace et le remarque travail des artisanes maroquiniĂšres d'Agadez @Katherine_pradeau

Si vous deviez faire votre auto portrait... que diriez-vous de vous ?

Curieuse, persĂ©vĂ©rante, parfois mĂȘme tĂȘtue, aimant prendre des chemins de traverse
 La tĂȘte dans les Ă©toiles et les pieds sur terre.



Quelle profession vouliez-vous exercer enfant ?

À la fois vĂ©tĂ©rinaire en Afrique ( sans doute inspirĂ©e par la sĂ©rie « Daktari » que j’adorais!) et styliste, travail de l’imagination et de la main. J’aimais aussi beaucoup la danse.



Quel est votre 1er souvenir de l'Ă©poque ?

NĂ©e dans une famille oĂč tout le monde aimait travailler de ses mains que ce soit en couture, bricolage et crĂ©ation d’objets, j’ai trĂšs jeune observĂ© et voulu faire Ă  mon tour : crĂ©ations d’habits et accessoires pour mes Barbies, petits meubles en bois ou carton, bijoux...



À quelle Ă©poque le monde de la mode a t-il croisĂ© votre chemin ?

Je me souviens d’avoir coupĂ© les chaussettes de mon pĂšre pour en faire des robes tubes pour mes poupĂ©es ! J’aimais aussi beaucoup dessiner de somptueuses robes de princesses.

Fascinée par les récits de caravanes racontés par mon institutrice de maternelle, je dessinais des dunes, des dromadaires et des tentes dans le désert. Les 2 mondes se sont métissés plus tard


Puis est venue adolescente la création de costumes de danse et la chorégraphie, un échappatoire à mes études de droit que je trouvais ennuyeuses.

"L'aventure continue bien au-delĂ   de la mode, Ă   suivre..." Katherine  Pradeau 

Quand avez-vous créé votre propre marque ?

En 1996, aprÚs avoir travaillé 10 ans dans de grandes maisons.

Un univers trĂšs parisien, chic et colorĂ©, inspirĂ© par les Parisiennes de Kiraz, en travaillant avec les artisans d’art de la couture parisienne puis petit Ă  petit en y incluent des clins d’oeil avec d’autres cultures, jusqu’en 2005 oĂč est sortie la premiĂšre collection mĂ©tissĂ©e avec les artisans touaregs.


Papillon d'argent, martelĂ© par forgerons d'Agadez Niger crĂ©ation  Katherine  Pradeau.

Vous ĂȘtes connue pour votre influence ethnique dans vos collections, comment est nĂ©e l'idĂ©e ?

Elle est nĂ©e petit Ă  petit, aprĂšs des heures et des heures passĂ©es avec les artisans, Ă  les regarder travailler, Ă  observer et admirer leurs techniques
 Des gestes de la main, prĂ©cis, une mĂ©moire sĂ©culaire transmise de gĂ©nĂ©rations en gĂ©nĂ©rations. Des savoir-faire dignes de l’univers du luxe... L’idĂ©e est venue de faire un rapprochement entre leurs savoir-faire ancestraux et les savoir-faire d’exception de la couture parisienne. C’est l’amitiĂ© forte, tissĂ©e avec eux au fil du temps qui nous a permis de rĂ©ussir ce projet, avant tout, humain.

Models mis à l'honneur sur la couverture du magazine Unité Fashion of Peace.

Que reprĂ©sente l'Afrique pour vous ? 

Un continent Ă  l’histoire sĂ©culaire, souvent mĂ©connue ou transformĂ©e.

Un continent aux multiples cultures, celles du mythique Sahara m’attirent particuliùrement.

J’y retrouve souvent, malgrĂ© nos diffĂ©rences, des valeurs qui nous sont communes.


Dans les montagnes de l’Aïr au Niger avec les chameliers

Vous avez une histoire forte avec le Niger en particulier. Pourquoi ce pays plutĂŽt qu'un autre ? 

Oui il y a le Niger depuis le dĂ©but, invitĂ©e Ă  plusieurs reprises par le crĂ©ateur Alphadi Ă  l’occasion du festival de mode FIMA. C’est lĂ  bas oĂč j’ai tissĂ© des liens forts en y retournant trĂšs souvent en dehors du festival. Mais la culture touareg n’a pas de frontiĂšre et s'Ă©tend dans tout le Sahara . Nomade dans l’ñme, comme les touaregs, il est toujours possible d’aller quelque part d’autre...

Robe en soie (la mĂȘme que sur la photo 1) impression sac touareg gĂ©ant et Bustier, jupe, jambiĂšres , crĂ©ation avec les maroquiniĂšres d’Agadez. Au bord du fleuve Niger

Vous partager votre vie entre la France et le Niger. Ce n'est pas toujours simple... Comment vous organisez-vous ?

Il est vrai que c’est parfois «mouvementé», mais j’ai aussi la chance d’avoir souvent le Sahara qui vient vers moi!

Je dirais mĂȘme que je vis Ă  la fois avec les français et avec les touaregs. Je suis donc en contact permanent avec la culture touarĂšgue que ce soit en France ou dans tout le Sahara.


"Au dĂ©sert, il faut passer par le cƓur pour  comprendre le murmure des vents de sable" Katherine Pradeau. Manchette en argent martelĂ© crĂ©ation Katherine Pradeau 

Si vous deviez définir votre marque qu'en direz-vous ?

Un art de vivre plutît qu’une marque.

Des créations qui reflÚtent tout un univers autour de la richesse des savoir-faire artisanaux, un métissage entre la couture parisienne et la culture touarÚgue.



Quels sont pour vous les 3 plus grands de la haute couture mondiale ?

Yves Saint Laurent, Chanel, Schiaparelli



Et en Afrique ?

Il y a beaucoup de crĂ©ateurs talentueux en Afrique mais ceux qui pour moi se rapprochent le plus de la Haute Couture, ou ont l’appellation (terme trĂšs rĂ©glementĂ©, initiĂ© par la fĂ©dĂ©ration de la couture Ă  Paris) : Chris Seydou le prĂ©curseur, Mickael Kra avec ses parures incroyables, Imane Ayissi pour son luxueux mĂ©tissage.


"Moush" chat sauvage du Sahara, chat couture.Création avec les maroquiniÚres Kel Tamajak

Quel rapport avez-vous avec les réseaux sociaux ?

Ils sont devenus indispensables mais attention Ă  ne pas se laisser envahir.

Je ne suis pas une adepte d’y mettre tout et n’importe quoi et d’y passer trop de temps.

J’ai un rapport plutĂŽt professionnel avec eux. J’aime bien y partager l’identitĂ© culturelle et des paysages du Sahara, mes coups de coeur et mon travail de crĂ©ation, en particulier sur ma nouvelle page Instagram:  sahara_by_katherine_pradeau



La femme que vous ĂȘtes aujourd'hui a-t-elle rĂ©alisĂ© ses rĂȘves d'enfant ?

En partie oui et mĂȘme plus que ce que j’avais rĂȘvĂ©.

Passer des rĂȘves d’enfant aux rĂȘves de la femme d’aujourd’hui en gardant toujours une Ăąme d’enfant, c’est cela la crĂ©ation...



Si vous aviez la possibilitĂ© de faire vous-mĂȘme les questions/rĂ©ponses laquelle vous seriez-vous posĂ©e et quelle rĂ©ponse y auriez-vous apportĂ©e ?

đŸ€” ma question :

đŸ«  ma rĂ©ponse :
Le monde touareg a conservé une forte identité culturelle notamment grùce aux femmes.

La femme depuis la nuit des temps est le pilier de la société touarÚgue qui est matriarcale.

« 
 L’indĂ©pendance Ă©conomique de la femme touarĂšgue, doublĂ©e d’une libertĂ© d’attitude peu commune dans le monde mĂ©diterranĂ©en, a impressionnĂ© nombre d’observateurs extĂ©rieurs. De fait, la femme occupe un rĂŽle de premier plan, assimilĂ© dans l’édifice social Ă  celui du pilier central. Elle incarne le noyau de la sociĂ©tĂ© d’oĂč partent tous les rameaux qui la composent, assurant leur stabilitĂ© et leur continuitĂ©.

Dans l’imaginaire touareg, l’élĂ©ment fĂ©minin est Ă  l’origine de toute chose. Mais tout germe pour se dĂ©velopper a besoin de son contraire, le masculin. Le monde n’avance que si ces deux moitiĂ©s, que l’on peut nommer de façon multiple : la terre et le ciel, l’intĂ©rieur est l’extĂ©rieur, la tente et le vide, le fĂ©minin et le masculin
 s ‘allient pour former un tout. La plus part des rites touaregs qui ponctuent les Ă©vĂšnements de la vie sociale, mettent en scĂšne l’ajustement de ces entitĂ©s, opposĂ©es et complĂ©mentaires. Pour aboutir, toute action repose sur un Ă©change Ă©quilibrĂ© avec l’autre... » extrait de « Touaregs Apprivoiser le dĂ©sert » de HĂ©lĂšne Claudot-Hawad.

Une conception tellement moderne qu’elle devrait ĂȘtre universelle !

C’est pour cette raison qu’il m’est trĂšs cher, au travers de mes collections, partenariats et actions en faveur de la prĂ©servation des savoir-faire artisanaux d’exception qu’ils soient touaregs ou d’ailleurs, d’accorder une place centrale aux femmes.

Elles sont les garantes d’un monde en harmonie.



De nouveaux projets pour 2025 ? 

2025 et plus


Toujours des projets autour de la culture touarĂšgue et des peuples du Sahara, accent sur un art de vivre luxueux et rare ouvert vers le monde. J‘aimerai Ă  ce sujet trouver les moyens de crĂ©er un lieu incroyable quelque part dans le Sahara... Un projet fou, peut-ĂȘtre, mais voilĂ  justement son intĂ©rĂȘt !



Toulou Kiki* est une actrice et chanteuse touarùgue originaire d’Agadez au Niger.

Elle est membre du groupe de musique touareg « Kel Assouf ».

Elle est, entre autres, l’actrice principale du film d’Abderrahmane Sissako, «Timbuktu », sĂ©lectionnĂ© au Festival de Cannes en 2014.

🎬:https://drive.google.com/file/d/1eR68fv5LZXDn_gj-QmXyK4oOrLQoNJCZ/view?usp=drivesdk


✒ Katherine est une styliste crĂ©atrice originale, une amie, qui fait un travail exceptionnel, alliant la mode parisienne et les savoir-faire de ma culture Touareg qui est millĂ©naire. Des crĂ©ations inattendues, pont entre l’occident et l’Afrique permettant le rayonnement de la culture touareg. Une inspiration mixte, un talent particulier, aux mĂ©tissages civilisationnels que j‘aime porter lors d’évĂšnements cinĂ©matographiques comme le Festival de Cannes ou le Festival Paris CinĂ©ma...

C’est pour moi une rencontre inĂ©dite, une amitiĂ© durable.

En 2000, Katherine  Pradeau  dĂ©couvre le Niger, le Sahara. 24 annĂ©es auprĂšs de la culture touarĂšgue,  et l'envie  de lier leurs savoir-faire d'exceptions de la couture parisienne.  Une invitation  au voyage avec le peuple touareg  Kel Tamashaq.

DiplĂŽmĂ©e du Studio Berçot, la crĂ©atrice Katherine Pradeau travaille aux cĂŽtĂ©s de Lolita Lempicka, Philippe Adec, Sonia Rykiel
 dix annĂ©es d’expĂ©rience qui lui permettent d’acquĂ©rir et de lancer sa marque Ă©ponyme en 1996.

Ses crĂ©ations, intemporelles et multiculturelles, prĂ©sentĂ©es et vendues dans le monde entier, sont inspirĂ©es par le dialogue des cultures, la richesse des savoir-faire des artisans d’art pour un nouveau style parisien cosmopolite. Ses nombreux partenariats , comme par exemple : les 3 Suisses, les chaussures AndrĂ©, les perfectos Schott, Dorotennis, Nintendo, Barbie, Swarovski,
 lui ont permis d’explorer diffĂ©rents crĂ©neaux de crĂ©ation et de distribution.

En 2000 la crĂ©atrice est invitĂ©e pour prĂ©senter ses collections parisiennes dans le cadre d’un festival de mode Ă  Niamey, le Fima. Ce fut un coup de foudre pour ce pays.

De retour Ă  Paris l’appel du Niger est de plus en plus fort, elle dĂ©cide d’y retourner seule, plusieurs fois par an, hors du contexte d’un Ă©vĂšnement.

TrÚs attirée pour le monde touareg, des amitiés durables se tissent...

Au fil des sĂ©jours et des voyages au travers du pays, elle dĂ©couvre et intĂšgre un monde, totalement diffĂ©rent du sien mais oĂč finalement certaines valeurs ne sont pas si diffĂ©rentes, un peuple, un univers fascinant. Elle se souvient alors des histoires de caravanes racontĂ©es par son institutrice de maternelle, de ses dessins de dunes, de dromadaires et de tentes dans le dĂ©sert
 un rĂȘve qui devient rĂ©alitĂ©.

Une rĂ©alitĂ© qu’elle a envie de raconter aux travers de ses crĂ©ations.

Ainsi, en 2005, naissent des collections mĂ©tissĂ©es avec les maroquiniĂšres touarĂšgues et les forgerons d’Agadez. Une invitation au voyage avec les Kel Tamashaq, le peuple touareg, oĂč se cĂŽtoient des techniques ancestrales uniques et la richesse du savoir-faire français, une rencontre inĂ©dite entre une crĂ©atrice et une culture au savoir-faire millĂ©naire.

Aujourd’hui plus de collections saisonniĂšres mais la libertĂ© d’avoir une autre vision de la mode, plus en osmose avec l’air du temps et la libertĂ© de sortir du cadre vers d’autres univers.

Ainsi naissent toujours des crĂ©ations au fil de ses voyages au Sahara, de ses rencontres artisanales et artistiques, de ses coups de cƓur...

Des collections hommage célébrant des savoir-faire authentiques et un art de vivre inédit.


* Ndlr : À lire prochainement  l'interview accordĂ©e par Toulou Kiki Ă   Mine d'Infos 

đŸ“· CrĂ©dit  photo  FrĂ©dĂ©ric De La Chapelle

⚖ Article libre de droit, sous rĂ©serve  de le sourcer.

đŸŽ€ Propos recueillis par 
Nora Ansell-Salles Legrand 

Commentaires

  1. Souvenir, Souvenir de ma 1ere rencontre avec Katherine Pradeau : https://www.jeuneafrique.com/196378/culture/haute-couture-en-couleur/

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