Stop aux téléconsultations commerciales par le Dr Christophe Prudhomme
🛑 Stop aux téléconsultations commerciales
La télémédecine constitue une avancée majeure pour améliorer le suivi de patients atteints de maladies chroniques ou encore pour accélérer les diagnostics en urgence, comme par exemple dans le cas des accidents vasculaires cérébraux. Tout comme l’intelligence artificielle, ces outils techniques, bien utilisés, constituent des progrès majeurs. Mais comme pour toute avancée technique, il faut s’interroger sur les avantages et les inconvénients de leur mise en œuvre au quotidien.
Ainsi, la télémédecine se développe dans un contexte de dégradation de notre système de santé avec une pénurie de médecins et une inégalité de répartition sur le territoire. Par ailleurs, les tenants du monde néolibéral considèrent que la médecine est un service commercial qui peut offrir de grandes opportunités d’investissements très rentables car la solvabilisation des patients est assurée très par la Sécurité sociale. De ce fait, la nature ayant horreur du vide, des entrepreneurs ont vite compris l’intérêt de la mise en place de plateformes de téléconsultation permettant de recruter des médecins en leur fournissant un outil de travail prêt à l’emploi. Si lors de la crise de la COVID, la restriction des contacts a permis un développement très rapide de ce type d’exercice, aujourd’hui le marché plafonne. C’est ce qui motive la montée au créneau d’une nouvelle Fédération des médecins téléconsultants pour réclamer des mesures de libéralisation pour augmenter leur activité. Si cette fédération dit regrouper des médecins, elle est en fait l’outil de lobbying des entreprises commerciales du secteur que sont par exemple Medadom, Tessan, Livi ou encore MédecinDirect, qui souhaitent pouvoir augmenter leurs chiffres d’affaires et donc leurs bénéfices.
Cette activité de téléconsultation a montré ses limites avec un fonctionnement de type service à la carte pour un patient transformé en consommateur achetant une ordonnance ou encore un arrêt de travail rapide. Non seulement des excès sont apparus immédiatement, notamment en ce qui concerne les arrêts de travail, mais le simple contact en visioconférence entre un médecin et un patient qu’il ne connaît pas, est source de risques non négligeables de passer à côté d’un diagnostic potentiellement grave.
Plus inquiétant est le fait que ce type d’activité détourne un nombre croissant de médecins de ce pourquoi ils sont formés et rémunérés par la Sécurité sociale, à savoir s’installer dans un cabinet. Si l’activité de télémédecine est considérée comme confortable et rémunératrice pour de nombreux jeunes médecins, il n’est pas acceptable que de plus en plus de praticiens s’y inscrivent.
Il n’est donc pas question que le ministre de la Santé accède à ces demandes. Son rôle doit être de prendre des mesures efficaces pour que tout citoyen puisse avoir un médecin traitant, qu’il puisse accéder à un spécialiste dans un délai raisonnable sans dépassement d’honoraires et qu’il puisse bénéficier d’une visite à domicile quand il est incapable de se déplacer.
Dr Christophe Prudhomme
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