Sur ce nombre, les complications graves apparaissent chez 35 % des malades, soit 70.000 personnes. Parmi ces complications, on trouve le diabète sucré insulino dépendant développé chez 15 % des personnes atteintes, des destructions articulaires pour 75 % d’entre elles, de l’insuffisance cardiaque chez 10 %.
La cirrhose du foie qui touche 15 % des hémochromatosiques soit 10.490 personnes en moyenne par an. C’est l’une des plus graves complications car elle dégénère en cancer du foie dans 5 % des cas ce qui représente 524 cancers du foie par an. En comparaison, il est de 17 % pour l’hépatite C.
Les causes
La surcharge en fer de tous les organes est due à un déficit en hepcidine qui n’est plus synthétisée par le foie. L’absorption digestive du fer augmente. La transferrine sursaturée à 100 % laisse du « fer libre » à l’origine de radicaux libres qui détruisent les cellules des organes d’où apoptose et altèrent les chromosomes, favorisent le stress oxydatif surtout dans le foie d’où fibrose, cirrhose et cancer. Aggravent encore cet état l’âge (> 50 ans), le sexe masculin, un virus, l’alcoolisme, un syndrome dysmétabolique associés.
Les lésions
Le cancer du foie survient sur cirrhose dans 70 % des cas, mais aussi sur foie hémochromatosique sain ou entièrement désaturé (30 %). Les aspects du cancer primitif du foie sont multiples. Il peut être diffus à tout le foie droit et gauche ou à certains segments du foie droit (IV, V). Ces formes sont graves car le traitement chirurgical est le seul possible. Enfin, il peut être détecté sous forme de nodules (1 à 2 cm) par échographie hépatique. Le pronostic est meilleur. Une ponction biopsie du foie vient alors confirmer le diagnostic.
Le diagnostic
Il est important de faire le diagnostic au début, lorsqu’il ne s’agit que d’un nodule de 1 à 2 cm. Il ne peut être fait que par l’échographie hépatique répétée à vie tous les 6 mois. C’est un examen peu coûteux, rapide, indolore. Il est associé au dosage de l’alphafoetoprotéine (protéine qui disparaît à la naissance et réapparaît avec le cancer). Découverte à ce stade, la tumeur peut être détruite par cryothérapie ou radiofréquence ou chimioembolisation. Lorsque la tumeur est volumineuse par défaut de diagnostic, on peut intervenir chirurgicalement soit en enlevant le lobe du foie, soit si le cancer est plus étendu faire une transplantation hépatique.
Les traitements
Ils dépendent de l’étendue du cancer et de l’état du foie restant en particulier de cirrhose, de l’atteinte cardiaque, de l’âge supérieur à 75 ans, des comorbidités (alcoolisme surajouté, hépatite virale, syndrome dysmétabolique, diabète sucré, traitement par saignées non régulier).
Dans les formes diffuses, infiltrantes des 2 lobes du foie, le traitement ne peut être que médical : Nexavar â.
Dans les formes localisées au lobe gauche, le traitement chirurgical est de mise mais le risque de récidive est grand.
Dans les formes nodulaires (1 à 2 nodules de 2 cm), on essaie un traitement transcutané par radiofréquence cryocoagulation ou chimioembolisation artérielle qui détruisent les nodules tumoraux. La survie peut être de plusieurs années sous surveillance.
Enfin la transplantation hépatique est le meilleur traitement si la tumeur est localisée, l’état général bon, après exploration pour éliminer des métastases. On traite le cancer et la cirrhose aussi bien C282Y homozygote que C282Y/H63D. Les suites immédiates sont identiques. Les patients opérés (10/11) n’ont plus besoin de saignées. Il est probable que le foie transplanté fabrique de l’hepcidine qui règle le métabolisme du fer. A 5 ans, la survie est de 55 % environ, plus faible que pour les autres transplantations qui est de 80 % (hépatite B, C, alcoolisme, cirrhose biliaire primitive, Wilson). En effet, dans l’HG, l’atteinte des autres organes, du cœur et du pancréas, ou une infection aggravent le pronostic. Ainsi lorsque la transplantation est faite avant l’apparition d’une cirrhose, la survie à long terme est nettement améliorée.
Conclusion
Le cancer est la complication la plus grave qui peut survenir dans l’hémochromatose génétique. Il y a 30 ans, l’apparition d’un cancer au cours d’une HG était au-dessus de tout traitement et l’on ne disait pas la vérité aux malades. Aujourd’hui on peut traiter ces malades et on leur dit la vérité. Nous devons en parler pour qu’ils n’oublient pas d’en faire le dépistage par échographie hépatique ».
Professeur Henri MICHEL
Président de l’ASSOCIATION HEMOCHROMATOSE France