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Tuberculose résistante : MSF dénonce des politiques et des pratiques insuffisantes et inadéquates |
Barcelone
/ Paris, le 30 octobre 2014 - Dans un
rapport présenté aujourd'hui à la 45ème Conférence mondiale de
l'Union sur la santé respiratoire en cours à Barcelone, Médecins Sans Frontières
(MSF) dénonce des politiques et des pratiques dépassées et des manques criants
dans la prise en charge de la tuberculose résistante aux médicaments (TB-R).
Les recommandations
internationales, ainsi que les stratégies ayant fait leurs preuves, sont peu ou
pas appliquées sur le terrain, contribuant à alimenter une crise de Santé
publique et de portée mondiale.
Les dernières données publiées
par l'Organisation mondiale de la santé (OMS) font état d'une situation
accablante : moins d'un tiers des patients atteints de TB multi résistante
recensés dans le monde sont diagnostiqués et, parmi eux, seulement un sur cinq
reçoit un traitement adapté.
MSF appelle les gouvernements,
les donateurs et l'industrie pharmaceutique à agir de toute urgence, avec les
outils dont ils disposent, pour renforcer la réponse à cette crise et éviter une
augmentation toujours plus importante du nombre de cas de tuberculose
résistante.
« L'heure n'est pas à la
complaisance: dans certains pays d'ex-Union Soviétique, plus d'un tiers des
patients chez qui MSF a diagnostiqué une TB-R n'ont jamais été traités
auparavant, ce qui implique une transmission directe, de personne à personne,
des formes résistantes de la maladie, explique le Dr Petros Isaakidis, médecin épidémiologiste MSF en charge de la
recherche opérationnelle en Inde. La tuberculose résistante est une
catastrophe d'origine humaine, entraînée par des années de négligence et par une
réponse lente et fragmentaire ».
Le rapport « Out of Step » de MSF souligne cinq manques principaux dans
la prise en charge adéquate de la TB-R : un accès insuffisant aux tests de
résistance aux médicaments ; un nombre croissant de personnes chez qui la TB-R
est diagnostiquée, mais qui ne reçoivent pas de traitement ; l'utilisation de
modèles de soins obsolètes et coûteux, comme l'hospitalisation par défaut des
patients ; un accès très limité aux médicaments les plus prometteurs, nouveaux
ou « requalifiés » ; et un très grave manque de financements qui, dans certains
pays, représentent moins de la moitié de ce qui serait nécessaire.
Par exemple, plus d'un an
après leur enregistrement, les nouveaux médicaments antituberculeux demeurent
hors de portée pour la grande majorité des patients : dans les huit pays étudiés
dans le rapport, la bédaquiline et le délamanide ne sont accessibles que pour un nombre très
limité de patients et seulement dans le cadre de dispositifs dits d' « usage
compassionnel ». De plus, aucun des pays n'intègre dans ses protocoles de soins
l'ensemble des médicaments « requalifiés », soit des médicaments existants ayant
montré une certaine efficacité contre la TB-MR, sur lesquels reposent les
traitements de dernier recours.
« Les entreprises et les
pays doivent accélérer les processus d'enregistrement des nouveaux médicaments.
Il faut également mener des essais cliniques intégrant les nouveaux médicaments
contre la tuberculose dans des protocoles plus courts, moins toxiques et plus
efficaces. Pour cela, il est nécessaire que la recherche et le développement
soient coordonnées et financés dans le seul but de donner accès au diagnostic et
au traitement à ceux qui en ont le plus besoin », conclut Grania Brigden, en charge du
dossier tuberculose à la Campagne d'accès aux médicaments essentiels (CAME) de
MSF.
Le rapport de MSF « Out of Step » présente
les résultats d'une enquête menée dans huit pays (Brésil, Inde, Kenya, Myanmar,
Russie, Afrique du Sud, Ouzbékistan et Zimbabwe), enquête basée sur des
indicateurs d'accès au diagnostic, au traitement et aux médicaments essentiels,
d'achats de médicaments et de financements. Cette analyse a été complétée par
l'expérience opérationnelle de MSF.
MSF mène des programmes de lutte contre la
tuberculose depuis 30 ans. Les premiers projets contre la TB-R ont été ouverts
en 1999. Aujourd'hui, MSF compte parmi les principales ONG permettant un accès
aux traitements contre la tuberculose résistante. En 2013, l'organisation a pris
en charge près de 30 000 patients
atteints de tuberculose dans le monde, dont environ 2 000 patients atteints de
tuberculose résistante aux médicaments.
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Ebola au Liberia – Il faut aussi traiter le paludisme |
Chaque année,
le paludisme fait des victimes au Liberia. Cette pathologie y est endémique.
Mais avec l’épidémie d’Ebola, il est devenu très difficile voire impossible de
se faire soigner. Face à cela, MSF a lancé à Monrovia une distribution de
traitements contre le paludisme. Environ 300 000 personnes vivant dans des
quartiers défavorisés de la capitale doivent en être les bénéficiaires.
Les équipes de MSF ont commencé,
le 25 octobre, à distribuer des traitements contre le paludisme dans l’ouest de
la capitale libérienne. Cette distribution a lieu dans les quartiers les plus
défavorisés où la densité de la population est très forte et où l’accès aux
soins, déjà très restreint avant l’épidémie d’Ebola, n’est pratiquement plus
assuré.
Pour pallier l’effondrement du
système de santé, MSF distribue un traitement antipaludéen à quelque 300 000
personnes à Monrovia. Ce traitement (artésunate/amodiaquine) est destiné aux enfants de plus de six mois,
mais aussi aux adultes.
« Les premiers symptômes du
paludisme sont les mêmes que ceux d’Ebola : fièvre, céphalées, fatigue intense,
indique le Dr Chibuzo Okonta, responsable adjoint des programmes d’urgences à
MSF. Nous avons décidé de donner aux
enfants comme aux adultes ce traitement antipaludéen qui est à la fois curatif
et préventif. Car l’objectif est aussi d’éliminer le risque que des patients
fiévreux considérés comme des cas suspects Ebola se retrouvent dans des centres
de traitement Ebola en contact avec des personnes contaminées.»
Avant la distribution, des
volontaires habitant le quartier et formés par MSF vont voir les familles pour
leur expliquer les modalités de l’opération. Et ils remettent un ticket à chaque
famille, entendue comme le nombre de personnes vivant dans une même pièce, qui
permettra de recevoir les médicaments.
C’est une femme de la famille qui vient sur le lieu de distribution pour
y retirer un sachet renfermant les traitements.
Le 29 octobre, 20 000 familles,
soit 100 000 personnes, habitant le quartier de New Kru avaient déjà reçu un
traitement. La distribution doit se poursuivre quelques jours dans d’autres
quartiers. Et elle se répétera les deux mois suivants aux mêmes endroits, avec
le même traitement et une moustiquaire.
Dans le contexte de la crise Ebola, la vigilance est de
rigueur. Pour protéger la population
comme le personnel contre les risques de contamination, la distribution a lieu
tôt le matin, quand les rues sont encore désertes, et elle est organisée de
manière à éviter tout contact physique en maintenant une distance entre tous les
participants. Et l’opération est
fractionnée sur pas moins de 55 sites.
Ensuite, après chaque distribution, les volontaires formés par MSF s’assurent que le
message a bien été entendu. Ils font du porte à porte pour vérifier si tous les
membres de la famille ont bien pris les médicaments même s’ils ne sont pas
malades puisque le traitement est curatif et préventif.