1 - Affirmons
nos compétences
Le Congrès annuel
de l’ADF qui se tiendra du 26 au 30 novembre 2013, a choisi pour thème cette
année « Affirmons nos compétences ». En effet, les capacités et compétences des chirurgiens
–dentistes sont acquises par six années d’études médicales supérieures et par
une formation continue permanente. C’est une profession qui nécessite un
savoir-faire à la fois scientifique, technique, pédagogique et médical.
Une profession multi-compétences pour répondre aux exigences
légitimes du patient…
Le
chirurgien-dentiste a envers son patient de nombreuses obligations. Il doit
utiliser les techniques les plus en pointe et les plus fiables pour lui
garantir des résultats en toute sécurité. Il a un devoir de pédagogie et
d’information. Ses devis doivent être clairement expliqués. Il doit enfin
savoir s’adapter à toutes les catégories de patients qu’il soigne, des plus
jeunes aux plus âgés.
Son
travail ne s’arrête pas après un traitement quel qu’il soit. Le
chirurgien-dentiste se doit d’assurer le suivi thérapeutique, la traçabilité de
tous les matériaux qu’il emploie,…. Il doit savoir comprendre une demande
parfois non formulée, proposer un plan de traitement adapté aux besoins
médicaux et à la demande du patient, savoir reconnaître une psycho-pathologie.
C’est donc
une véritable relation thérapeutique qui s’instaure entre le praticien et son
patient où rentrent en jeu de multiples compétences professionnelles d’ordre
psychologiques, humaines, médicales et techniques…
Au cœur de la chaîne de soins …
Le
chirurgien-dentiste est le médecin de la bouche à part entière et il tient un
rôle médical majeur en santé publique. Docteur en chirurgie dentaire, il sait
voir au-delà des caries, il inspecte bien sûr les dents, mais également la
bouche, les maxillaires, les tissus attenants,… pour détecter les maladies
parodontales, les cancers bucco-dentaires, les troubles du comportement
alimentaire, du stress, les interférences éventuelles avec les maladies
cardiaques et le diabète,…
Les dents
et la bouche sont des indicateurs de la santé. Aller consulter son
chirurgien-dentiste régulièrement (une à deux fois par an), sans attendre une
rage de dents mais juste
pour prévenir, est une nécessité. Le chirurgien-dentiste,
au même titre que les autres professions médicales, est un acteur de la bonne
santé en général.
2 - Usure dentaire, quels sont les premiers signes
d’alerte des pathologies bucco-dentaires.
Conseils de vigilance et réponses à
apporter…
D’après un entretien avec le Dr
Richard Kaleka, chirurgien-dentiste, Paris
Hypersensibilité
dentinaire, épisodique ou continue, amincissement disgracieux de l’émail, sont
les premières manifestations de l’usure dentaire.
Qu’est-ce que l’usure dentaire ?
L’usure
dentaire n’est pas une pathologie, c’est un processus physiologique qui découle
du fonctionnement des dents dans leur milieu naturel : la cavité buccale. Les
dents ont pour vocation biologique de nous accompagner durant toute notre vie.
Mais toutes n’atteindront pas forcément la ligne d’arrivée ! En effet, la
maladie carieuse et la maladie parodontale peuvent prélever sur elles un tribut
de taille qui est variable selon les individus, les conditions de vie et de
soins, mais aussi selon les paramètres généraux de santé et plus rarement, la
génétique.
Toutes les
études démontrent, depuis une trentaine d’années, que l’élévation du niveau
d’hygiène dentaire dans les pays développés a permis de diminuer considérablement
les maladies des dents et des gencives. Ces résultats positifs se lisent donc
comme la promesse d’une longévité accrue de l’organe dentaire. Or, le paradoxe
tient dans l’espérance de vie des personnes aujourd’hui : les dents, mieux
préservées, ont une durée de vie plus longue et sont plus longtemps exposées ;
comment vont-elles pouvoir se maintenir tout en remplissant pleinement leur
fonction jusqu’à un âge avancé ?
Quels sont les facteurs responsables ?
L’usure
naturelle des dents résulte des contacts répétés qu’elles entretiennent avec
leurs voisines d’à côté et d’en face (attrition) pour déglutir, mastiquer
(fonction) et éventuellement se serrer compulsivement pour gérer le stress
(parafonction).
Ces
multiples formes de friction déclenchées par une alimentation plus ou moins
granuleuse, les mouvements de la langue, des lèvres et des joues, la brosse et
le dentifrice…, altèrent progressivement les tissus durs de la dent en les
abrasant. Ces corps durs, constitués de minéraux d’une très grande densité
(phosphates de calcium/fluor) sont cependant extrêmement résistants à l’usure.
Mais leur talon d’Achille est leur vulnérabilité chimique due au contact
prolongé avec des acides qui, contrairement à la maladie carieuse, ne
sont pas générés localement par les
bactéries dites cariogènes. Ces acides agresseurs de l’émail (la coque dure qui
donne aux dents leur blancheur et leur capacité à couper, lacérer et broyer les
aliments) sont d’origine externe (alimentaire) ou interne (digestive) ; l’acide
chlorhydrique provenant de l’estomac affecte la bouche par vomissements ou
reflux gastro-oesophagien.
Toutes les
études récentes démontrent que la consommation alimentaire moderne use et abuse
des boissons et aliments acides. Aussi bien chez les plus jeunes enfants, que
chez les adolescents et les adultes. Le remplacement de l’eau, par des jus de
fruits et des boissons acidifiées (sodas) a créé une addiction dont on peut
constater les méfaits au quotidien dans les bouches. On voit en effet de plus
en plus une usure des dents bien plus avancée que laisserait présager l’âge du
patient.
Comment évaluer l’état de l’usure et ses causes ?
Deux
situations cliniques sont possibles :
1.
Le patient se plaint
d’hypersensibilité dentinaire :
C’est la
manifestation spécifique d’une mise à nu, même minuscule, de la dentine (le
tissu minéralisé sensible qui est recouvert par l'émail au niveau de la
couronne (partie émergée de la dent), et par le cément au niveau des racines.
Une hyper sensibilité tactile, thermique ou chimique constitue un
avertissement. Il s’agit là d’un premier signal qui ne doit pas être négligé.
Si une
lésion d’usure est identifiée sur une dent (avec des aides visuelles), sa
localisation au collet de la dent — avec ou sans récession gingivale — ou sur
la face « triturante » orientera sur des tests de contact dentinaire (sonde) et
des tests thermiques discrets (jet d’air sur la dent).
Dans tous
les cas, la totalité des dents des deux arcades sera examinée à la recherche
d’autres signes d’usure dentaire.
Le
patient se plaint de l’aspect disgracieux mais indolore de ses dents Le jaunissement dentaire correspond à l’amincissement de
l’émail des dents antérieures qui laisse voir la dentine plus jaune par
transparence. Ces manifestations impliquent presque toujours la combinaison de
l’action d’acide avec un brossage excessif doublé d’un mauvais choix de brosse
et de dentifrice. L’examen de la zone concernée et celui de la totalité de la
denture orientent le diagnostic étiologique. Dans les deux cas, l’interrogatoire
initial doit être approfondi pour rechercher l’origine externe et/ou interne
des expositions acides :
- Externe : aliments (salades,
sauces d’assaisonnement vinaigrées et / ou citronnées, fruits et jus, boissons
acidulées ou gazeuse, vins) - médicaments (acide ascorbique, salbutamol)
-environnement (chlore dans les piscines) - Interne : acide chlorhydrique
gastrique (reflux gastro-oesophagien, vomissements répétés).
Si un
reflux chronique est suspecté, le chirurgien-dentiste pourra alors conseiller à
son patient de consulter un gastroentérologue (dans une très forte proportion
de cas, le reflux est asymptomatique).
Le milieu
buccal est normalement en mesure de limiter l’effet érosif sur les tissus
dentaires par l’action de la salive : la pellicule organique et la biochimie
salivaire (saturation ionique et pouvoir tampon) concourent à la protection et
la régénération minérale des tissus durs, sauf si l’intensité et la fréquence
de l’attaque acide débordent les ressources physiologiques. Les situations de
diminution du flux salivaire sont, par conséquent, propices à une érosion
dentaire accrue.
Est-il possible de traiter ?, comment prévenir ?
Certains
auteurs ont proposé une analyse des lésions au travers d’un indice déterminé
sur des critères de degré d’atteinte, assortie d’une grille de propositions de
traitement.
La perte
tissulaire par usure est souvent constatée trop tardivement et la restauration,
si elle est envisagée, reste problématique compte tenu de la localisation, du
nombre de dents affectées et de la nécessité de contrôler les causes au
préalable pour éviter un échec par récidive. A ce titre, la prévention reste la
meilleure solution. Elle implique un diagnostic ultra-précoce, basé sur la
détection de signes d’appel et des pertes d’usure superficielles
infra-cliniques (aides visuelles). L’aspect des dents doit être finement
analysé : perte des périkymaties (micro-reliefs à la surface de l’émail),
aspect de l’émail satiné plutôt que brillant, plages de dentine visibles sous
l’émail aminci, perte des pointes des dents avec cratères, aplatissement des
faces dentaires, etc. Des mesures seront mises en place visant à supprimer les
causes érosives (information sur les pratiques hygiéniques et alimentaires,
traitements médicaux) ou à en minorer les effets (boissons sportives,
dentifrices et bains de bouche renforcés en ions calcium/phosphate, fluorures
minéraux et organiques). En regard des conseils du chirurgien-dentiste, c’est
la prise de conscience et l’investissement personnel du patient dans la durée
qui est gage de résultats.
Des photos
et des moulages permettront, dans les cas sévères, de contrôler l’évolution des
usures.
L’usure
dentaire révèle l’existence de contraintes mécaniques et chimiques s’exerçant
sur les dents. C’est l’évolution moderne des modes de vie qui fait apparaître
des formes pathologiques, altération de phénomènes physiologiques. Elle est en
effet le plus souvent révélatrice de troubles du comportement alimentaire, de
mauvais choix alimentaires ou d’hygiène dentaire compulsive et mal conçue.
Le service
rendu par le chirurgien-dentiste dans la prise en compte de l’usure dentaire,
va donc au-delà de la seule réhabilitation esthétique et fonctionnelle et
justifie pleinement la notion de prise en charge médicale globale.
Bibliographie
1) ADDY M., SHELLIS R.P. Interaction between attrition, abrasion and erosion in
tooth wear 2006
Monogr
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2) KALEKA
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d'usure (LCU):
étiopathogénie 2001 Réalités Cliniques 12 (4); 367-385
3)
LASFARGUES J.-J., COLON P. Odontologie conservatrice et restauratrice
Tome 1 :
une approche médicale globale Editions CdP, Paris
Décembre 2009
4) ZERO D.T., LUSSI A. Erosion-chemical and biological factors of importance
to the dental
practitioner 2005 Int Dent J;55 : 285-290
QUIZZ USURE DENTAIRE
A—L’érosion dentaire est un
processus qui atteint enfants et adultes
B—L’abrasion et l’érosion ne
sont jamais associées dans la même bouche
C—Le signe précoce de l’érosion
des dents peut souvent être une hypersensibilité dentinaire
D—Le reflux gastro-oesophagien
est toujours symptomatique (gastralgies)
E—La sécheresse buccale
chronique protège les dents de l’usure
REPONSES
A—VRAI
B—FAUX
C—VRAI
D—FAUX
E—FAUX
- Les dents, révélateur de
3 - Quelles sont les réponses au bruxisme ?
D’après un entretien avec le Dr Bernard Fleiter,
Responsable de la consultation « Troubles fonctionnels oraux-faciaux » de
l’hôpital Charles Foix, Ivry
Le bruxisme, qui se caractérise
en particulier par des usures dentaires, génère un trouble de l’occlusion. 20 à
40 % des adultes seraient concernés. Il est la principale « manifestation du
stress sur les dents ». Illustré par des serrements, des frottements, des
claquements de la mâchoire et des dents, le bruxisme trouve son origine au
niveau du système nerveux autonome.
Comment prendre en charge les
personnes concernées ? Peut-on répondre à leurs attentes esthétiques ? Comment
incorporer des restaurations dentaires chez ces patients ? Comment les aider à
prendre conscience de cette parafonction et modifier leurs comportements ?
Peut-on espérer une diminution des symptômes ? Dents usées jusqu’à la dentine,
couronnes fracturées,… Comment aborder ces patients qui systématiquement «
cassent tout » y compris leurs prothèses de tous types et même leurs
gouttières, qui pourtant sont censées les soulager et les protéger ?
S’il est impossible d'apporter
des réponses définitives à toutes ces questions, certaines données physiologiques
permettent aujourd’hui au chirurgien-dentiste de dépister les formes à forte implication
psychologique, d’optimiser la communication auprès du patient et d’orienter
celui-ci vers les traitements prothétiques les plus adaptés. A présent, une
véritable approche globale est adoptée, faisant souvent appel au concours
d’autres professionnels de santé comme le médecin généraliste, le psychologue
comportementaliste, le psychiatre…
Un diagnostic et une prise en charge pluridisciplinaires
En effet, le bruxisme requiert
des compétences pluridisciplinaires. C’est un véritable travail d’équipe entre
chirurgiens-dentistes et thérapeutes comportementalistes qui doit s’instaurer,
notamment chez les jeunes adolescents.
Les approches diagnostiques et
thérapeutiques doivent être minutieuses et incorporer une large analyse
clinique prenant en compte les aspects psycho-comportementaux. L’examen permet d’identifier
des contractions rythmées au niveau des masséters, une hypertrophie de ces
zones, signe d’hyperactivité. Le diagnostic clinique du bruxisme consiste pour
sa part en l’observation de l’usure dentaire (perte de relief occlusal,
fractures spontanées, modifications esthétiques). Il est parfois complété par
l’avis du laboratoire spécialisé dans le sommeil qui permet de bien définir le
type de bruxisme et son degré d’importance.
Les différents types de bruxisme
Il existe deux types de bruxisme
:
- Le bruxisme primaire qui se
manifeste en dehors de toute cause médicale ;
- Le bruxisme secondaire qui
serait associé à des troubles tels que la consommation excessive de tabac,
d’alcool, de médicaments comme les antidépresseurs. Les maladies psychiatriques
ou neurologiques sont également très impliquées.
Les manifestations
Pour l’Académie américaine des
troubles du sommeil (ASDA), le bruxisme se traduit par des mouvements
stéréotypés et périodiques de serrement ou de grincement des dents pendant le
sommeil. Le bruxisme est alors considéré comme une parasomnie, un trouble du
sommeil.
Dans la grande majorité des cas,
le bruxisme ne dure que quelques secondes (4 à 5 secondes) et n’est pas nocif
pour les dents. Le phénomène est à prendre au sérieux lorsque les épisodes
deviennent plus fréquents et plus longs. Ils se déroulent donc pendant le
sommeil ou au cours de la journée et sont souvent associés aux troubles
pré-cités. Les conséquences sont visibles au niveau de la sphère bucco-dentaire
: usure et douleurs des dents, douleurs musculaires,… exigeant l'intervention
du clinicien.
Les traitements du bruxisme
Les recommandations actuelles de
traitement du bruxisme comprennent une approche cognitivocomportementale
(incluant la relaxation), la physiothérapie et le port d’une orthèse occlusale
ou gouttière, pour prévenir les dommages dentaires. L’orthèse occlusale protège
les structures dentaires permettant de rééquilibrer les forces dans l’axe des
dents, préserve les articulations temporo-mandibulaires des surcharges et,
éventuellement, limite les effets de contraction des muscles élévateurs.
Ainsi, dans le cas d’un bruxisme
sévère, le port d'une orthèse de protection nocturne est recommandé. En effet,
si la gestion du bruxisme d'éveil est assez largement maîtrisable, les
activités parafonctionnelles lors du sommeil sont plus difficiles à gérer et
relèvent le plus souvent d'une thérapeutique orthopédique : le fameux « pyjama
dentaire ».
La situation clinique du patient
entre en ligne de compte pour orienter le choix du chirurgiendentiste : l’âge,
l’état général, l’état de la denture…
Ainsi, chez un adulte jeune
bruxeur, en denture naturelle ne présentant ni édentement ni maladie ou déficit
parodontal, la protection des dents peut être réalisée facilement par une
orthèse de recouvrement occlusale thermoformée dont le rôle interceptif et le
confort de port seront prépondérants.
Il faut
beaucoup d’information, quelquefois de la reconstruction dentaire et quasiment
toujours de la protection, en sachant qu’en fonction de certains épisodes
émotionnels, sociaux, comportementaux, même pour un bruxisme qui va sembler
rentrer dans l’ordre, il peut y avoir des épisodes de réactivation.
La prise
de conscience du bruxisme par le patient conditionne une grande partie de sa
prise en charge. Ainsi, dès la première consultation, le praticien incitera
celui-ci à repérer les moments de crispations, de serrements de dents.... La
tenue d’un agenda est conseillée afin d'identifier les horaires de ces épisodes
de bruxisme.
Dans le
cas d’un patient âgé, dont le bruxisme aura entraîné des usures dentaires
généralisées avec une perte de calage occlusal, l’utilisation d’une orthèse,
tout à la fois rigide et facilement modifiable, permettra à la fois de protéger
la denture et tester une dimension verticale thérapeutique.
De même,
le choix du matériau peut être orienté par l’état général du patient avec l’éventualité
de plus en plus fréquente de rencontrer des terrains allergiques à certains
composants utilisés pour réaliser ces orthèses. Dans les cas sévères, une
orthèse métallique avec « overlay » résistera plus longtemps et permettra, dans
certains cas, de remplacer également les dents absentes tout comme une prothèse
amovible.
La
décision d’entreprendre un tel traitement est liée à la demande du patient
contrarié par un handicap fonctionnel (destruction étendue, édentements
associés, etc.) ou un préjudice esthétique (évidemment localisé aux dents
antérieures mais impliquant les secteurs postérieurs). Quelles sont les
questions que le praticien doit se poser pour apporter au patient la meilleure
réponse à la situation qu’il présente ? D’abord, obtenir une adhésion totale au
plan de traitement proposé et au pronostic qui devra évoquer tous les risques
liés au caractère multifactoriel de l’étiologie du bruxisme. Ensuite, avoir
bien évalué les bénéfices du traitement ainsi que les risques (échec à court
terme, difficulté de bien gérer les facteurs occlusaux des traitements étendus)
et les coûts en termes de mutilation dentaire supplémentaire, de temps passé et
d’investissements pécuniaires. Enfin, s’assurer que le patient a bénéficié d’un
délai de réflexion suffisant pour accepter la proposition de traitement ou
d’abstention adaptée à sa situation.
Au total,
si le chirurgien-dentiste apparaît directement impliqué dans la prise en charge
du bruxisme, il est essentiel que les particularités de celui-ci soient mises
en lumière afin de contenir les effets délétères de cette parafonction
fréquente dont les principales victimes sont les dents.
Pour une bonne santé bucco-dentaire, il est recommandé :
- 2
brossages par jour matin et soir pendant 2 minutes
- Utilisation
d’une brosse à dent souple
- Utilisation
d’un dentifrice fluoré avec un dosage en fluor adapté en fonction des âges
- Passage du
fil dentaire tous les soirs
- Une visite
une fois par an chez son chirurgien-dentiste
- A chaque
fois que vous ne pouvez pas vous brosser les dents, rincez-vous la bouche à
l’eau
claire et/ou mâchez un chewing-gum sans sucres pendant 20
minutes
- Une
alimentation équilibrée sans grignotage
Bactéries et cavité buccale
La bouche, on n’y pense pas toujours, est d’un point de vue
microbiologique, la zone la plus
septique de l’organisme !
En effet, 500 à 600 espèces bactériennes différentes y ont
été identifiées. Parmi ces bactéries,
certaines, dites commensales, ont un rôle protecteur et
d’autres, au contraire, sont responsables
des pathologies carieuses et parodontales (maladies de
gencive). Ces bactéries se colonisent dans la
plaque dentaire.
Les bactéries responsables de la maladie carieuse
entrainent une déminéralisation des tissus durs de
la dent, provoquant l’apparition d’une cavité.
Les bactéries déclenchant les parodontites (pathologies à
l’origine de la destruction osseuse autour
des dents) s’accumulent sous la gencive et déclenchent une
réaction inflammatoire, créant une
poche entre la dent et la gencive. Les bactéries contenues
dans cette poche libèrent des toxines à
l’origine de la destruction de l’os et de la gencive.
La prévention de ces pathologies repose sur une élimination
efficace et quotidienne de la plaque
bactérienne.
4- La vérité sur les implants
D’après un entretien avec le Dr
Franck Renouard*
Responsable scientifique de
l’implantologie pour le Congrès de l’ADF
et représentant du Council
(Comité de surveillance de l’European Association for Osseointegration)
* « Je certifie
n’avoir aucun conflit d’intérêt qui pourrait influencer mes écrits »
Conserver, extraire, implanter : une prise de décision complexe
La décision de la conservation
ou de l’extraction d’une dent se fait au cas par cas. Il s’agit d’évaluer
rigoureusement le pronostic d’une solution conservatrice ou de déterminer
l’intérêt d’un traitement implantaire et de ses traitements associés.
Cette décision thérapeutique
repose sur de nombreux critères. Le chirurgien-dentiste procède à une
évaluation clinique telle que la perte d’attache, la mobilité, le degré de
l’infection et de la profondeur de poche au sondage. Ensuite, il vérifie, grâce
à la radiographie, l’ancrage osseux résiduel et la présence de lésions
osseuses. Enfin, il s’attache à évaluer plus globalement la nature de la
pathologie parodontale (chronique ou agressive) de son patient, sa compliance
au traitement et son état de santé.
D’une manière générale, le choix
de conserver une dent se fait quand la pérennité à long terme de l’organe
dentaire ne se discute pas. En effet, l’acharnement thérapeutique autour d’une
dent présentant des lésions avancées peut satisfaire la demande immédiate du
patient qui a généralement du mal à se résoudre à perdre sa dent, mais peut
complexifier de façon importante la pose d’un implant en cas d’échec des traitements
conventionnels. Il faut rappeler que le fait d’avoir réalisé plusieurs
chirurgies endodontiques non couronnées de succès sur une même dent compromet
le succès implantaire futur.
Lorsque les dents ne peuvent
plus être conservées, les traitements implantaires doivent être considérés en
première intention. En effet, ces derniers permettent d’envisager des taux de
survie implanto-prothétiques satisfaisants à condition que les patients soient
intégrés dans un suivi à long terme.
Le but est de rendre le meilleur
service, en offrant le meilleur pronostic, si possible au moindre coût.
Ce fait engage la responsabilité
morale du praticien qui se doit de rechercher la bonne solution.
Qu’est-ce qu’un implant ?
L’implant
désigne la partie intra osseuse. C’est une vis, généralement en titane, qui va
remplacer la racine de la dent. La couronne est la partie visible de la
restauration. Le plus souvent réalisée en céramique, elle reproduit la forme et
la couleur de la partie émergente de la dent manquante.
Avant
l'implantologie, lorsqu’une dent devait être remplacée, le chirurgien-dentiste
n'avait d'autre solution que la pose d’un bridge dentaire
qui nécessitait de tailler les dents adjacentes. Depuis quelques années, les implants dentaires se sont
imposés pour la reconstruction des dents perdues. Préservant au maximum
l’intégrité de l’organe dentaire, leurs bons résultats fonctionnels et
esthétiques font qu’ils représentent aujourd’hui la solution de premier choix
pour le traitement de toutes formes d'édentement (perte d’une ou plusieurs
dents). Ils règlent également les difficultés masticatoires consécutives à la
perte des dents et qui entraînent le plus souvent une détérioration
potentiellement grave de la digestion.
1 – L’implant : la solution de premier choix
Pendant de
nombreuses années, l’implant dentaire était considéré comme une technique ayant
peu de recul, réservée aux cas pour lesquels les solutions traditionnelles
n’étaient pas envisageables. Le chirurgien-dentiste devait alors faire
signer au patient un consentement éclairé stipulant le caractère « expérimental
» de la technique.
Aujourd’hui,
le regard porté sur l’implantologie a évolué. Ne pas proposer un traitement par
implants dentaires est considéré comme un manque de chance pour le patient. Un
chirurgien-dentiste qui taillerait des dents pour placer un bridge, sans
proposer la solution implantaire, peut se voir poursuivi pour non-information.
Bien entendu, le patient peut refuser le traitement par implant mais la loi
oblige le praticien à présenter toutes les solutions fiables pour traiter la
perte d’une ou de plusieurs dents.
L’implant
dentaire est à présent la solution privilégiée pour remplacer des dents
absentes. En effet, la technique est parfaitement codifiée avec des taux de
succès élevés (90% à 10 ans). Son avantage, hormis sa fiabilité, tient dans le
fait qu’en cas d’échec le patient se retrouve dans la situation de départ sans
altération des dents voisines. Bien entendu, tous les cas ne trouvent pas leur
solution par la pose d’un implant, il reste des contre-indications relatives ou
absolues.
2 – L’implant : un acte pas toujours bénin
Compte
tenu de ses succès, l’implantologie connaît un engouement majeur qui laisse à
penser qu’il s’agit d’un acte simple. Poser un implant dentaire reste un acte
chirurgical. La plupart du temps, il s’agit d’une intervention mineure, moins
traumatisante que l’extraction d’une dent. L’intervention se fait dans des
conditions d’asepsie contrôlée. Quand le volume osseux est bon, en particulier
dans les secteurs postérieurs (prémolaires et molaires), l’intervention
chirurgicale est rapide avec peu de conséquences. La prise d’antalgiques
simples pendant un ou deux jours doit suffire à maitriser l’éventuelle douleur
post-opératoire. Les chirurgiens-dentistes continuent à prescrire un flash
antibiotique avant la pose d’implant, bien que cela soit aujourd’hui discuté.
Après 3 mois de cicatrisation la couronne peut être mise en place.
Cependant,
dans les secteurs antérieurs (visibles au sourire), l’obtention d’un beau
résultat esthétique peut se révéler difficile. En effet, la perte de la dent
s’accompagne généralement de perte d’os. Si le chirurgien-dentiste pose un
implant sans reconstruire la crête osseuse, le résultat esthétique risque
d’être médiocre avec, par exemple, une dent trop longue. Il faut bien
comprendre que le résultat sera esthétiquement parfait si la dent a la couleur
de celles qui l’entourent. Elle doit également présenter la même forme. C’est
la symétrie qui crée l’illusion de la perfection. La gencive doit parfaitement
entourer la dent, se situer au même niveau que sur les dents adjacentes et
enfin reproduire la petite languette rose que l’on retrouve entre les dents (la
papille).
L’incisive
centrale gauche est une couronne sur implant. La symétrie en couleur et en
forme de la dent et de la gencive crée l’illusion naturelle.
Si le
patient a perdu de l’os lors d’un traumatisme, ou suite à des infections
osseuses (parodontopathies), la morphologie de sa « gencive » ne sera pas
régulière. La pose d’un implant sans reconstruction préalable de l’os aura des
conséquences esthétiques négatives. Les techniques de reconstruction osseuse
sont parfaitement codifiées. Elles nécessitent une pratique régulière de la
part du praticien et l’acceptation du patient du fait qu’il faudra parfois
plusieurs interventions chirurgicales avant que la couronne ne soit posée. Ce
n’est qu’après avoir discuté avec le chirurgien-dentiste qui lui aura donné
toutes les explications nécessaires ainsi que les évaluations financières
inhérentes aux différents traitements que le patient pourra choisir entre les
différentes options.
Les
questions concernant le maintien d'une bonne santé gingivale sont essentielles
pour la tenue à long terme des implants. Les pathologies gingivales que l'on
rencontre sont, en général, d'apparition tardive et se calquent sur les
gingivites et parodontites observées autour des dents naturelles. Le premier
stade, la mucosite, est réversible et sans séquelle sur l'os entourant
l'implant. Par contre, la péri-implantite est une entité pathologique que l'on
commence à bien connaître et qui va entraîner des pertes osseuses pouvant
aboutir à terme à remettre en cause le pronostic même de l'implant. De
nombreuses études ont été réalisées sur ce sujet et montrent l'origine bactérienne
de cette pathologie, avec une flore proche de celle que l'on trouve dans les
parodontites dentaires. Les traitements et les mesures de prévention vont être
semblables à ceux utilisés en parodontie : nettoyage des sites, enseignement
d'une hygiène adaptée, détermination de profils prothétiques adaptés,
réalisation de lambeaux d'assainissement lorsque la pathologie a progressé,
comblement osseux, utilisation de membranes résorbables ou non, utilisation d'antimicrobiens
par voie générale, etc. Les possibilités thérapeutiques sont multiples, la
leçon principale étant, comme en parodontie, la mise en place de mesures
préventives qui vont éviter l'apparition ou, pour le moins, ralentir le développement
de la maladie péri-implantaire.
Une étude
attentive des facteurs de risque, préalable à l'acte implantaire, va permettre
de réduire fortement les possibilités d'échec de la thérapeutique. Ce plan de
traitement doit être compris et accepté par le patient et les rendez-vous
programmés en fonction des priorités. Les premières priorités concernent : l’assainissement
parodontal, le contrôle du risque carieux et les avulsions. Les secondes
priorités concernent : le traitement des caries, le contrôle de la plaque, le surfaçage
radiculaire, l’ajustement occlusal et le traitement endodontique.
3 – Les bonnes ou moins bonnes indications : savoir
contre-indiquer l’implant
L’implant
dentaire est un des moyens de répondre à la demande des patients, pas une
finalité. Jamais un patient ne va aller voir son chirurgien-dentiste pour lui
demander des implants. Il lui demande de retrouver une bonne fonction
masticatoire ou un sourire si possible parfait.
Souvent la
pertinence de l’implant ne se discute pas. Quand le volume osseux est suffisant
et que le patient ne présente pas de contre-indication générale à la chirurgie
buccale, le premier réflexe face à la perte de dents est de « penser »
implants. L’indice de satisfaction des traitements implantaires est très bon.
Bien entendu il y a des complications et des échecs, mais ils sont en général
moins nombreux qu’avec les techniques dites traditionnelles.
L’indication
implantaire peut se discuter quand la pose de l’implant doit s’accompagner de techniques
annexes telles que la reconstruction de l’os. Le patient doit recevoir toutes
les informations sur les risques d’échec et de complications (qui existent dès
qu’une intervention chirurgicale est pratiquée).
Le
chirurgien-dentiste est sensé dire « non » quand il pense que le traitement par
implant nefonctionnera pas.
4 – Modalités : l’utilisation de techniques fiables et éprouvées
a - Le
matériau implantaire
A ce jour,
le matériau idéal pour un implant dentaire reste le titane. Le risque de
réaction allergique est rarissime. Toutes les études conduites autour d’implants
en fonction depuis plusieurs années puis retirés de la mâchoire n’ont jamais
révélé d’inflammation ou de présence de cellules de défense de l’organisme.
La durée
de vie d’un implant dépendra du bon entretien bucco-dentaire.
Après un
essai malheureux dans les années 80, l’implant en zircone est de nouveau
proposé. Bien que les résultats semblent prometteurs, il est raisonnable d’attendre
des études à très long terme pour utiliser ce type de matériau.
b- L’implantation
immédiate après les extractions
Ce
protocole a été proposé de façon à réduire le délai de traitement. Aujourd’hui
la prudence et la patience sont de mises. La gencive peut en effet se rétracter
dans les semaines qui suivent l’extraction. Ceci peut avoir des conséquences
esthétiques et fonctionnelles lourdes à gérer par la suite. C’est pourquoi à
présent de nombreux praticiens préfèrent d’abord extraire la dent et attendre quelques
semaines pour la cicatrisation de la gencive. Enfin, l’implant est mis en place
en y associant des techniques de reconstructions osseuses ou gingivales si
nécessaires. La temporisation (remplacement temporaire de la dent manquante)
est réalisée alors soit avec une prothèse amovible, soit avec une dent collée
aux dents adjacentes.
5 – Les
orientations actuelles de l’implantologie. Simplifier les traitements pour en
réduire la morbidité
L’implantologie
s’est développée en 3 phases :
- La
première a été la phase des pionniers de 1965 jusqu’au début des années 90.
Cette période a permis la mise au point de protocoles efficaces.
- Face à l’engouement
suscité par de très bons résultats, les praticiens ont tenté de pousser les indications
et le niveau des résultats encore plus loin en développant des techniques toujours
plus sophistiquées. Mais les chirurgiens-dentistes se sont alors retrouvés
confrontés aux limites de la biologie et de la tolérance tissulaires. Loin d’avoir
des résultats encore meilleurs, les praticiens ont vu au contraire l’apparition
de complications spécifiques liées à la complexité des techniques.
- Aujourd’hui,
l’implantologie entre dans une nouvelle ère qui est celle de la précision et de
l’adaptation. Par exemple, l’utilisation d’implant de diamètre ou de longueur
réduits permet d’éviter de réaliser des greffes osseuses. De même, les progrès
de l’imagerie radiographique permettent aux chirurgiens-dentistes d’« essayer »
les implants sur les mâchoires des patients reconstruites en 3D sur ordinateur
avant de pratiquer les interventions. La morbidité (risque encourus en cas d’échec
et/ou pendant la chirurgie) est ainsi diminuée. Le coût des traitements se voit
également réduit.
L’avenir
de l’implantologie reposera sur des techniques de simplification réversibles en
cas d’échec.
L’objectif
du chirurgien-dentiste est de diminuer la morbidité autour du traitement. C’est
pour cette raison, qu’avant de poser un implant, le chirurgien-dentiste
effectue un bilan médical complet de son patient (traitements en cours, prise
de médicaments …). Il explique les indications du traitement et procède à un
examen médical et une radio de la bouche de son patient. Le chirurgien-dentiste
termine par étudier la faisabilité ou non de la pose de l’implant.
Le coût d’un implant
- Acte chirurgical de la pose de l’implant : environ 1 000
/ 1200 €
- Réalisation de la prothèse : environ 700 €
LEXIQUE
- Infra-clinique : un signe
que l'on peut observer chez le malade atteint d'une maladie donnée
avant
qu'il n'en présente les symptômes. Un signe infra-clinique peut servir à
établir un diagnostic précoce qui permet souvent d'améliorer le traitement. La
détection de signes infra-cliniques nécessite souvent un examen médical
spécifique faisant appel à des techniques sophistiquées, comme l'imagerie
médicale.
- Perikymaties : les
sillons peu profonds correspondants à la ligne formée par les stries à la
surface de
l'émail
- Pointe cuspidienne
: pointe bosselée des dents
- Système nerveux
autonome : la partie du système nerveux responsable des fonctions automatiques,
non soumise au contrôle volontaire. Il contrôle notamment les muscles lisses (digestion,
vascularisation...), les muscles cardiaques, la majorité des glandes exocrines (digestion,
sudation...) et certaines glandes endocrines.
- Septique : qui peut
entraîner une infection
- Commensal : qui a un
rôle protecteur